1 Samuel 17, 1-10+23b-26+40-51

David et Goliath, la grâce et la loi

Saint Augustin

Discours sur le psaume 143, 4, Tome II, p. 1307s

 

          Vous savez que le premier peuple fut chargé de nombreux sacrements visibles et corporels, d’une circoncision, d’un sacerdoce laborieux, d’un temple plein de figures, d’un grand nombre d’holocaustes et de sacrifices. Telles sont les armes plus embarrassantes qu’utiles qu’a dû déposer David. Car si la loi qui a été donnée avait pu donner la vie, il serait vrai de dire que la justice vient de la loi. A quoi donc a servi la loi ? L’apôtre continue : Mais l’Ecriture a tout renfermé sous le péché, afin que la promesse de Dieu s’accomplit par la foi en Jésus-Christ, en ceux qui croiraient. Aussi qu’a fait David, c’est-à-dire le Christ, la tête et le corps, qu’a-t-il fait quand la nouvelle alliance a été dévoilée, quand la grâce de Dieu a dû être enseignée et appréciée ? Il a quitté ses armes et a pris cinq pierres : ces pierres qui l’embarrassaient, il les a mises de côté. Il a donc rejeté les sacrements de la loi, sacrements qu’il n’a point imposés aux Gentils, et que nous n’observons point. Non que nous devions rejeter la loi de Dieu, mais depuis l’accomplissement des promesses nous n’avons plus à nous arrêter aux symboles qui les annonçaient : ce qu’ils nous promettaient est arrivé. La grâce du Nouveau Testament, voilée dans la loi, nous est dévoilée dans l’Evangile. Nous avons écarté le voile et reconnu ce qu’il nous dérobait : nous l’avons reconnu dans la grâce de Notre Seigneur Jésus-Christ, notre chef et notre Sauveur, lui qui a été crucifié pour nous et à la mort de qui le voile du Temple se déchira. David quitté les armes, ce fardeau de l’ancienne loi, pour prendre la loi ; car ces cinq pierres dans le torrent, et vous savez ce que signifie ce torrent ; car cette vie mortelle s’écoule, et tout ce qui vient au monde ne fait que passer ! Ces pierres étaient donc dans le torrent, ou dans ce peuple primitif, pierres inutiles, ne produisant rien : le torrent passait dessus. Que fit David pour que la loi devînt utile ? Il prit la grâce, car on ne saurait accomplir la loi sans la grâce, puisque la plénitude de la loi, c’est la charité. Comment donc David a-t-il montré que la loi ne peut agir sans la grâce, si ce n’est qu’en voulant joindre avec la grâce ces cinq pierres qui désignaient la loi renfermé dans les cinq livres de la loi ; il les mit dans son vase de berger destiné à recueillir le lait du troupeau ? Armé de ces pierres, c’est-à-dire armé de la grâce, plein de confiance en Dieu, il s’avança contre l’orgueilleux Goliath, plein de jactance et de confiance en lui-même. Il prit une de ces pierres, la lança, en frappa le front de son adversaire qui tomba blessé dans cette partie du corps où n’était pas le signe du Christ.