2 Samuel 2,1-11 + 3,1-5

Sacre de David à Hébron

Caroline Chevalier-Royet

Le roi David dans l’exégèse du Moyen Âge, CE 166 Supplément, p. 84s

 

          La typologie est l’un des procédés courants pour déceler le sens allégorique d’un passage biblique. De nombreux personnages ou éléments de l’Ancien Testament sont considérés comme des préfigurations de personnages ou d’éléments du Nouveau Testament : ainsi le roi David est-il décrit comme une préfiguration, un type, du Christ.

          Cette correspondance établie entre la figure de David et celle du Christ permet d’abord de développer de riches explications reliant Ancien et Nouveau Testament : pour les lettrés médiévaux, les événements difficilement compréhensibles de l’Ancien Testament doivent être lus à la lumière de la Révélation apportée par les Evangiles. Considérons le récit de l’accession de David au trône d’Israël ; le récit biblique rapporte trois onctions successives, l’une à Bethléem, dans la maison de son père, une deuxième comme roi de Juda à Hébron, le texte que nous venons d’entendre, et, enfin, une troisième, à Hébron encore, comme roi d’Israël. Comment comprendre ces hésitations apparentes de l’Ecriture ? Les exégètes actuels y voient la fusion de traditions concurrentes en un seul récit. Mais dans ce passage, Rupert de Deutz, un moine bénédictin (1075-1130), résout la difficulté en rapprochant la triple onction de David de la triple consécration marquant la vie du Christ.

          « Il faut savoir que ce prophète et père d’un fils si important a reçu l’onction à trois reprises. La première fois, il est oint par Samuel au milieu des siens, à l’insu de Saül ; la deuxième fois, à Hébron, comme roi sur la maison de Juda, après la mort de Saül ; la troisième fois, comme roi de tout Israël, parce que l’ensemble de la maison de Saül avait été déchu de ses espoirs de règne.

          Toutes les onctions du Christ sont lumineusement préfigurées en celui-ci, comme dans un miroir. En effet, il a reçu l’onction à trois reprises : la première fois quand il a été conçu de l’Esprit Saint ; la deuxième fois au moment de son baptême, lorsque l’Esprit s’est révélé sous la forme d’une colombe fondant sur lui ; la troisième fois lorsque ressuscitant d’entre les morts il répandit sur ses fidèles la grâce de son onction d’autant plus grande qu’ici le futur roi, son ancêtre, désire le recommander par ces mots : Voyez ! Qu’il est bon, qu’il est doux d’habiter en frères tous ensemble. C’est une huile excellente sur la tête qui descend sur la barbe, sur la barbe d’Aaron, qui descend sur le col de ses tuniques. »