Luc 1, 39-56

L’Assomption de la Mère

Adrienne von Speyr

La servante du Seigneur, p. 166s

         

           Dans l’Assomption de la Mère, c’est aussi la fête de Pâques qui s’accomplit pour elle. Ces deux fêtes n’en forment qu’une seule, car le jour de Pâques, le Seigneur lui-même s’apprêtait à monter vers son Père et vers notre Père. A Pâques, sa mission terrestre était achevée, et les quarante jours entre Pâques et l’Ascension étaient déjà en quelque sorte le commencement visible de sa future mission céleste. A Pâques, Jésus a définitivement triomphé et, dans la lumière de cette victoire, il embrasse du regard toute son œuvre de Rédemption : sa Passion, sa déréliction, la fécondité de son obéissance. Cette vue le remplit d’un amour nouveau et infini pour le Père.

            C’est dans le même esprit pascal que la Mère monte au ciel. Ce que le Fils vit à Pâques, la Mère le vit à son entrée au ciel : elle saisit tout à coup le sens de sa vie terrestre, elle voit combien elle a été associée à l’œuvre universelle de la Rédemption ; le Fils lui montre à quel point chaque instant de sa vie était un service fécond, à quel point elle a vécu et œuvré pour l’Eglise et pour tous. Elle reconnaît d’un coup un tas de choses qui lui étaient inconnues et qu’elle cherchait si peu à connaître qu’elle se les tenait cachées à elle-même. A présent, le Fils lui montre son œuvre et toute la part qu’elle y a prise. Elle voit ce qu’il y a de marial dans le Christ, elle comprend ce que signifie être la Mère de Dieu. Tout en elle se résume comme dans l’unité, unité en Dieu et dans la vie éternelle, qui est aussi l’unité authentique et personnelle de Marie.

            Et elle contemple maintenant tout ce en quoi elle a cru jusqu’ici : la divinité de son Fils qu’elle a bien sûr adoré, mais comme un mystère caché en lui et pour elle. Elle contemple l’abîme du Père et voit l’Esprit Saint qui autrefois l’a couverte de son ombre et ne l’a plus quittée depuis. Elle reconnaît la cohérence de toute l’histoire du salut, l’accomplissement des prophéties, et elle voit la place qu’elle y tient. Elle comprend à quel point elle était nécessaire à cette œuvre du salut et combien Dieu a compté sur elle. Elle voit les premières promesses faites au sortir du Paradis et elle voit que toutes les générations ont attendu son oui pour retrouver le chemin du Paradis. Elle voit aussi qu’à aucun moment Dieu n’a eu à s’inquiéter du oui qu’elle prononcerait, bien plus, qu’il l’avait de toute éternité si bien cachée en lui que toute sa liberté ne pouvait consister que dans ce oui au service de son Dieu. Il l’avait si bien choisie pour Reine de toute éternité qu’il ne lui restait plus qu’à être éternellement sa Servante.