Ephésiens 4,25 – 5,7

« Soyez les imitateurs de Dieu »

Saint Augustin

Traité de la conduite chrétienne, Tome 23, p. 203s

 

                Si des hommes, pécheurs comme nous, pétris de la même boue, nous ferait rougir s’ils nous voyaient pécher, combien plus devons-nous révérer et craindre le Dieu tout-puissant, éternel, seul sans péché, qui voit et examine, non seulement nos actions, mais même nos pensées ? Craignons-le donc en tout temps, ayons toujours avec nous le respect de sa présence, et que l’espérance du pardon nous relève. Mais aussi, que la crainte de l’enfer nous afflige sans cesse. Avant tout, et par-dessous tout, ayons la charité, souvenons-nous de ce précepte du Seigneur : Ayez en vous le sel de la sagesse, et conservez la paix entre vous (Marc 9,49). Et de cet autre : « Je vous donne un commandement nouveau, c’est de vous aimer les uns les autres (Jean 13,34). Ailleurs il est dit : Ayez la charité qui est le lien de l’unité (Colossiens 3,14). Et encore : Soyez les imitateurs de Dieu comme ses fils bien-aimés, et marchez dans l’amour (Ephésiens 5,1). Et de nouveau : Que toute amertume, toute colère, tout emportement, enfin toute malice soit bannie entre vous (Ephésiens 4,31). Enfin : Que le soleil ne se couche point sur votre colère (Ephésiens 4,27). Car, de même qu’aucun remède ne peut servir à une blessure dans laquelle le fer est encore, ainsi la prière de celui dont le cœur renferme une haine mortelle ne lui est d’aucune utilité.

                Oui, frères, possédons la charité, car, si nous l’avons, nous serons ornés de toutes les vertus. Mais si nous n’avons point la charité, quelque bien que nous paraissions avoir, nous perdons tout. Ne nous lassons jamais dans la résolution que nous avons prise de bien faire, surtout en nous rappelant cette parole de Notre Seigneur : Celui qui met la main à la charrue, et regarde derrière lui, n’est pas digne des cieux (Luc 9,62). Or, regarder en arrière, ce n’est rien autre chose que se repentir du bien qu’on a commencé, et s’enchaîner de nouveau dans les vains désirs du monde. Mais, quelque soit le nombre de nos fautes, ne perdons jamais l’espoir du pardon, car, si grande que soit la malice de l’homme, la miséricorde divine est encore beaucoup plus abondante. C’est le psalmiste qui nous le dit : Le Seigneur est plein de miséricorde, et on trouve en lui une abondante rédemption (Psaume 139,7).