Ephésiens 4, 1-16

Appel à l’unité

Saint Augustin

Lettre XVIII à Célestin, OC 4, p. 280s

         

          Il est une chose que je voudrais vous répéter sans cesse, c’est qu’il faut nous débarrasser de tous soins inutiles, pour nous occuper seulement de ceux qui sont utiles et salutaires. Car de vivre en ce monde exempt de tous soucis, c’est une chose qu’on ne saurait espérer.

          Je connais une question qui, malgré sa brièveté, n’en est pas moins grande. Il y a une nature muable par rapport au temps et aux lieux, c’est le corps. Il y a aussi une nature muable, non par rapport aux lieux, mais par rapport au temps, c’est l’âme. Il y a encore une nature qui n’est muable, ni par rapport aux lieux, ni par rapport au temps : c’est Dieu. Ce que je vous indique comme muable d’une manière quelconque s’appelle créature ; ce qui est immuable en tous points s’appelle créateur.

          Or, comme les choses ne sont qu’autant que nous pouvons dire qu’elles subsistent et qu’elles sont unies, et que l’unité est la forme et le principe de toute beauté, il vous est facile de voir dans cette division des natures, ce qui est d’une manière souveraine, et ce qui, tout en tenant le dernier degré de l’être, ne laisse pourtant pas d’exister ; comme ce qui tient le milieu entre ces deux degrés, c’est-à-dire ce qui est au-dessus du plus bas, et ce qui est au-dessous du plus haut. Le plus haut degré, ou l’être souverain, c’est la béatitude même ; le plus bas n’est ni la béatitude, ni le malheur. Le degré intermédiaire est malheureux s’il penche vers le plus bas, comme il est heureux s’il se tourne vers le plus haut, c’est-à-dire vers l’être souverain. Celui qui croit en Jésus-Christ n’aime pas le degré inférieur, ne s’enorgueillit point d’occuper le degré du milieu, et devient capable de s’attacher au degré supérieur, c’est-à-dire à l’être suprême. Cela comprend tout ce qu’on nous ordonne de faire, ce qu’on nous enseigne, et ce qui doit être l’objet de nos vœux les plus ardents.