2 Rois 3, 5-27

Le miroir sans tache

Sainte Claire

Quatrième lettre de sainte Claire à Agnès de Prague, Sanctoral, p. 265s

         

          Heureuse celle à qui il est donné de prendre part au banquet sacré pour s’attacher de toutes les fibres de son cœur à celui dont toutes les bienheureuses armées des cieux admirent sans cesse la beauté, dont l’affection touche, dont la contemplation refait, dont la bienveillance comble, dont la suavité comble davantage, dont la mémoire brille suavement. A son parfum, les morts revivront, sa vision glorieuse rendra bienheureux tous les citoyens de la Jérusalem d’en-haut, puisqu’il est la splendeur de la gloire éternelle, l’éclat de la lumière éternelle et le miroir sans tache.

          Ce miroir, regarde-le chaque jour ; en lui mire continuellement ta face, pour qu’ainsi toute entière, intérieurement et extérieurement, tu te pares, drapé et enveloppé dans des étoffes variées, paré également des fleurs et des vêtements de toutes les vertus. Dans ce miroir resplendit la bienheureuse pauvreté, la sainte humilité et l’ineffable charité, comme, avec la grâce de Dieu, tu pourras le contempler par tout le miroir.

          Considère le principe de ce miroir, la pauvreté de celui qui a été déposé dans une crèche et enveloppé de petits langes. Ô admirable humilité, ô stupéfiante pauvreté ! Le roi des anges, le Seigneur du ciel et de la terre est couché dans une crèche ! Au milieu de ce miroir, considère l’humilité, la bienheureuse pauvreté, les labeurs sans nombre et les peines qu’il supporta pour la rédemption du genre humain. Et à la fin de ce même miroir, contemple l’ineffable charité par laquelle il a voulu souffrir sur le poteau de la croix et mourir là du genre de morts le plus honteux de tous.

          Aussi ce miroir, posé sur le bois de la croix, avertissait lui-même les passants de ce qu’il fallait considérer là : Ô vous qui passez par le chemin, considérez et voyez s’il est une douleur comme ma douleur. Alors nous répondrons d’une seule voix, d’un seul esprit, à celui qui crie et se lamente : Dans la mémoire, je me souviendrai et mon âme, en moi, se liquéfiera.