Isaïe 29, 1-8

Sur Ariel

Père Yvan Marchal

Le livre d’Isaïe, p. 127s

 

                Les quelques versets que nous venons d’entendre entonnent un chant de Sion sous la forme d’un oracle de malheur où Jérusalem devient le théâtre d’une opération militaire, menée par Dieu lui-même, puis l’objet d’une sollicitude soudaine de sa part.

                La volonté de faire miséricorde et de libérer la cité est en fait contenue en germe dans le danger de ruine qui l’attend : l’évocation de David, qui campa devant la ville et la conquit, illustre l’intervention de Dieu qui veut lui manifester sa fidélité, la sauver et lui rendre sa splendeur. Souvent exposée au danger, elle est sans cesse conduite au salut. Avant de dévoiler son nom de Sion, comme une référence à la protection divine, elle est surnommée Ariel à plusieurs reprises.

                La ville est ici désignée du nom symbolique d’Ariel ? Pourquoi ce nom ? Les commentateurs se perdent en conjectures. Les uns ont voulu voir dans Ari un mot désignant le foyer de l’autel ; Isaïe aurait alors voulu dire que Jérusalem servait de foyer à un gigantesque sacrifice. D’autres corrigent Ariel en Ouriel : Isaïe, pensent-ils, aurait transformé Ourousalem, le vieux nom de la ville qui signifiait camp du dieu de Salem, en Ouriel camp de Dieu. L’un d’entre eux suppose, plus simplement, qu’une des tours de Sion se nommait Ariel, ce qui signifie : Dieu est un lion.

                Dans cet oracle, Dieu promet qu’il fera disparaître les ennemis comme se dissipe un cauchemar. Reste, pour le temps présent, l’endurcissement qui empêche d’entendre les paroles du prophète. Dieu se révèle ainsi à la fois assaillant et sauveur, à la manière de David qui, après avoir humilié la ville lors de sa conquête, l’embellit. Jérusalem est en même temps une citadelle inexpugnable et un brasier dans lequel sont consumés ses agresseurs. Le salut de la Ville sainte se profile à l’intérieur du péril.

                En somme, cet oracle sur le sort futur d’Ariel contient à la fois la menace d’une terrible épreuve et la promesse d’une résurrection, le pire et le meilleur. C’est tout à fait ainsi que devaient se dérouler les événements consécutifs à l’intervention de Sennachérib en Palestine, autour de l’an 701.