Genèse 15, 1-21

La postérité d’Abraham

Père André Feuillet

Abraham notre Père, VS 83, 1950, p. 27s

 

          Tout chrétien cultivé connaît, ou du moins devrait connaître les développements des lettres aux Romains et aux Galates sur la foi d’Abraham : de toute évidence, aux yeux de saint Paul, Abraham est le type même du croyant. Les vingt-quatre vieillards de l’Apocalypse nous rappellent qu’aux yeux de Jésus et des écrivains du Nouveau Testament, les patriarches Abraham, Isaac et Jacob occupent une place hors de pair dans le Royaume de Dieu. Ce n’est pas sans raison, ce sont des pionniers ; ce sont eux, les premiers qui ont ouvert la voie royale de la foi, de l’espérance et de l’amour. Ce sont nos pères dans la foi. Ils doivent nous aimer d’autant plus qu’ils trouvent en nous, non pas des enfants qui leur sont venus par les voies normales de la chair et du sang, mais des enfants de promesse et de grâce comme Isaac, des enfants que Dieu leur a donnés. Leurs enfants, selon la nature, se sont éloignés de la voie ouverte par eux, et comme l’explique admirablement saint Paul dans la lettre aux Romains, c’est nous qui avons pris leur place.

          Frères, avons-nous conscience de cette filiation ? Quand nous célébrons ou participons à l’eucharistie, il nous arrive de faire mémoire, avec la première prière eucharistique, du sacrifice de notre père Abraham. Parmi les chrétiens, combien y en a-t-il qui, de temps en temps, songent à invoquer Abraham, leur père dans la foi ?

          Il importe de rester dans la note juste. Il est tout à fait normal  que nous ayons plus d’attrait, quand nous voulons nous édifier, à lire la vie de saint Paul, des autres saints du Nouveau Testament, ou de ceux qui se sont illustrés durant deux mille ans de chrétienté, qu’à nous remettre en mémoire les histoires que le livre de la Genèse nous raconte sur Abraham. Et pourtant, l’existence d’Abraham a un sens spécial, et son rôle dans l’Eglise est unique : il est lui, et lui seul, le père des croyants. Il ne convient pas que les enfants soient totalement oublieux de leur père.