Jean 1, 19-28

Une grande amitié

Jean Bernardi

Histoire des saints et de la sainteté chrétienne, Tome 3, p. 170s

 

          Une grande amitié a traversé l’existence de Grégoire depuis les alentours de sa vingtième année jusqu’aux abords de la cinquantaine. Etudiants à Athènes, Basile et Grégoire, qui se connaissaient déjà, ont noué des liens qui ne se sont jamais relâchés. Grégoire était sensible, Basile était fort et né pour commander ; Basile entreprenait et Grégoire suivait, parfois en maugréant ou en souriant des ardeurs de son ami. Au terme de ses études, Basile avait inauguré un monastère dans les propriétés de sa famille. Grégoire l’y suivit, mais, rappelé par son père, il ne put y rester. Leurs carrières ont été dans l’ensemble parallèles jusqu’à la mort de Basile, le 1er janvier 379.

          On a beaucoup glosé sur l’amertume engendrée chez Grégoire par un acte d’autorité de Basile, qui, devenu évêque de Césarée, exigea en 372 que son ami accepte la consécration épiscopale. A y regarder de près, ces deux hommes se sont constamment prêté main-forte dans les difficultés. Lorsque les moines de Nazianze s’insurgent contre leur vieil évêque qui s’était empêtré dans des définitions théologiques arianisantes, c’est Basile qui s’entremet et qui jette dans la balance tout son crédit auprès des moines. Lorsque l’empereur Valens  se rend à Césarée pour contraindre Basile à embrasser le Credo arien, Grégoire est auprès de lui pour l’assister.

          La place de Basile est unique dans le cœur de Grégoire : pourtant cet amoureux de solitude noue des liens les plus divers et entretient des correspondances avec les gens les plus différents. Nous avons conservé près de deux cent cinquante lettres qui montrent que Grégoire, cet homme de Dieu, garde presque toujours le sourire et qu’il ne hausse le ton que lorsque c’est absolument nécessaire. Il s’adapte sans effort à la personnalité de ses correspondants, quels qu’ils soient. C’était une époque où le style à la mode exigeait, dans les lettres, une extrême brièveté, voisine de la sècheresse : le goût de Grégoire le porte constamment à la mesure qui fait de lui le plus authentique des Grecs. Parmi les saints, Grégoire, qui a vécu en Asie Mineure au IV° siècle après Jésus-Christ, est certainement le représentant le plus éminent de l’antique Athènes et tout ce que l’on a appelé l’atticisme.