Genèse 2, 4b-25

En modelant la chair de l’homme, Dieu entrevoyait déjà son Fils

Tertullien

De la résurrection de la chair, OC, 5-6, p. 328s

 

          Dieu est le Créateur de l’homme. Il l’est aussi du monde en sa totalité. Mais quelle différence entre ces deux créations ! Dans la constitution du monde, tout a été fait par la Parole de Dieu, et sans elle rien n’a été fait. Quand il s’agit de créer l’homme, c’est également la Parole de Dieu qui opère, puisque sans le Verbe de Dieu, rien n’a été fait. En effet, Dieu dit d’abord cette parole : Faisons l’homme. Mais de plus, pour exprimer la prééminence de cette créature-là sur toutes les autres, Dieu la façonna de sa propre main. Dieu, est-il dit, modela l’homme.

          Merveilleuse différence qui trouve sa raison d’être dans les divers ordres de la création ! Les premiers êtres créés, en effet, sont inférieurs à celui pour qui ils  ont été créés ; c’est pour l’homme que Dieu les a faits et il les remet aussitôt en son pouvoir. Il est donc juste que l’ensemble des êtres fût produit par un ordre, un commandement, un seul mot : cela convenait à leur état de soumission. L’homme, au contraire, qui devait être le seigneur des autres créatures, fut modelé par Dieu lui-même : pour devenir seigneur, il fut formé par le Seigneur.

          Et Dieu, dit l’Ecriture, modela l’homme avec la glaise du sol. Ce n’était encore que de la glaise, et déjà le nom d’homme est prononcé. Quel honneur prodigieux pour le limon, ce rien, d’être touché par les mains de Dieu ! Ce simple contact n’aurait-il pas suffi à Dieu pour former l’homme, sans rien de plus ? Mais à voir Dieu travailler cette boue, on comprend qu’il s’agissait d’une œuvre extraordinaire. Les mains de Dieu étaient à l’ouvrage, elles touchaient, pétrissaient, étiraient, façonnaient cette glaise qui ne cessait de s’ennoblir à chaque impression des mains divines. Imagine-toi Dieu occupé, appliqué tout entier à cette création : mains, esprit, activité, conseil, sagesse, providence, amour surtout orientaient son travail ! C’est qu’à travers ce limon qu’il pétrissait, Dieu entrevoyait déjà le Christ qui, un jour, serait homme, comme ce limon : Verbe fait chair, comme cette terre qu’il avait entre les mains.

          Tel est le sens de cette première parole du Père à son Fils : Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance. Dieu modela donc l’homme selon l’image de Dieu, c’est-à-dire selon le Christ. Dès lors ce limon qui revêtait l’image du Christ, telle qu’elle se manifesterait dans son Incarnation future, n’était pas seulement l’œuvre de Dieu, il était aussi le gage de Dieu !