Matthieu 6, 1-6+16-18

La prière du Christ atteint son sommet sur la croix

Benoît XVI

Homélies, homélie pour le mercredi des Cendres, p. 375s

 

          La prière nourrit l’espérance, car rien n’exprime davantage la réalité de Dieu dans notre vie que de prier avec foi. Même dans la solitude et dans l’épreuve la plus dure, rien ni personne ne peut m’empêcher de l’adresser au Père, dans le secret, de mon cœur, où lui seul voit.

          Deux moments de l’existence terrestre de Jésus viennent à l’esprit ; l’une se plaçant au début et l’autre presque à la fin de sa vie publique : les quarante jours dans le désert dont s’inspire le temps du Carême, et l’agonie à Gethsémani, tous deux essentiellement des moments de prière. Une prière solitaire avec le Père, en tête à tête, dans le désert, et une prière pleine d’angoisse mortelle dans le Jardin des Oliviers. Mais que ce soit dans l’une ou l’autre circonstance, c’est en priant que le Christ démasque les tromperies du tentateur et l’emporte sur lui. La prière démontre être la première et principale arme pour affronter de manière victorieuse le combat contre l’esprit du mal.

          La prière du Christ atteint son sommet sur la croix, en s’exprimant à travers les dernières paroles que les évangélistes ont recueillies. Là où il semble lancer un cri de désespoir : Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? (Marc 15,34). En priant ainsi dans cette ultime solitude avec toute l’humanité, il nous ouvre le cœur de Dieu. Il n’y a donc pas de contradiction entre ces paroles du psaume 21 et les paroles pleines de confiance filiale : Père, entre tes mains, je remets mon esprit (Luc 23,46). Elles sont également tirées d’un psaume, imploration dramatique d’une personne qui, abandonnée de tous, se remet avec confiance à Dieu. La prière de supplication est donc le leitmotiv du Carême ; elle nous permet de reconnaître Dieu comme l’unique ancre du salut. Même quand elle est collective, la prière du peuple de Dieu est la voix d’un seul cœur et d’une seule âme, un dialogue en tête à tête, comme l’émouvante imploration de la reine Esther lorsque son peuple va être exterminé : Ô mon Seigneur, notre Roi, Tu es l’Unique ! Viens à mon secours, car je suis seule et n’ai de recours que Toi et je vais jouer ma vie.