Genèse 41, 1-17a+25-43

Le sacrifice de l’Eglise, c’est le martyre

Père Divo Barsotti

Vie mystique et mystère liturgique, p. 407s

 

          Le Christ et l’Eglise sont un. Si le Christ est présent dans le monde par l’acte de sa mort, le sacrifice eucharistique qui rend présent cet acte n’est pas célébré dans l’Eglise comme l’offrande et le sacrifice du Christ seul. Avec Jésus prêtre et victime, c’est l’Eglise, une avec lui, qui offre et qui s’offre. L’acte de la mort du Christ se continue par notre mort, non pas tant par la mort naturelle des hommes, que par une mort volontaire, comme celle de Jésus, librement acceptée par l’homme. L’Eglise ne serait plus une avec le Christ, et elle n’aurait pas le droit d’offrir le sacrifice du Christ, si celui-ci n’était pas aussi le sien. Or, le sacrifice de l’Eglise, c’est le martyre. C’est pourquoi on célébrait le sacrifice eucharistique sur la tombe des martyrs, pour signifier l’unité du martyre avec le sacrifice de Jésus. La mort des martyrs et la mort de Jésus ne sont qu’un seul acte de rédemption : la victoire continue du Christ sur les puissances de l’enfer.

          Si le Christ est présent dans le monde par l’acte de sa mort, alors le martyr réalise, plus que tout autre chrétien, le Mystère du Christ : il s’immerge dans ce mystère et y participe plus que tout autre. Le temps qui s’écoule, entre la mort du Christ et la fin du monde, ne semble pas avoir d’autre but que de préparer et de consommer l’holocauste, non pas de quelques-uns, mais vraiment de toute l’Eglise, et dans l’Eglise, l’holocauste de tout l’univers qu’elle aura rassemblé dans le Christ, précisément en participant au Mystère de sa mort, de sorte que, par le sacrifice du Christ total, tout l’univers soit consommé dans la gloire de Dieu.

          L’unité entre le sacrifice du Christ et le sacrifice des martyrs est telle qu’Origène pouvait écrire avec une profonde vérité : Depuis qu’il n’y a plus de martyrs, je crains que nos péchés ne nous soient pas remis. De même que si les fidèles ne ressuscitaient pas, le Christ ne serait pas ressuscité ; on peut dire que le Christ ne serait pas mort si la vie de l’Eglise n’était pas un martyre continuel. Le martyre, en continuant la mort du Christ, devient comme le signe permanent de la rédemption, la preuve que cette rédemption est un acte présent qui opère, avec une efficacité divine, l’unité des fidèles avec le Christ.