Exode 3, 1-20

Moïse, les bergers, le feu dans le buisson d’épines

Saint Aelred de Rievaulx

Sermons pour l’année, 3, Pain de Cîteaux 18, p. 36s

 

           Passons jusqu’à Bethléem, et voyons ce Verbe, telles étaient les paroles des bergers. Ce sont presque les mêmes paroles que prononça jadis Moïse : Je passerai, dit-il, et je verrai cette grande vision. Il voyait un buisson, et, dans ce buisson, il y avait un feu, et pourtant le buisson ne se consumait pas.

          Pourquoi donc y avait-il là du feu ? Certainement pour illuminer, non pour consumer. C’est cela la grande vision dont Moïse disait : Je passerai et je verrai cette grande vision. C’est comme s’il avait lu dans l’Evangile les paroles prononcées par les bergers : Passons jusqu’à Bethléem, et voyons ce Verbe.

          Frères, Moïse avait certainement lu ces paroles, mais dans le livre de la prédestination divine, là où Dieu a déjà réalisé ce qui est à venir ; c’est pourquoi il dit : Je passerai et je verrai cette grande vision.

          Il semble qu’il y ait quelques différences entre ces paroles de Moïse et celles des bergers dont il est question à la Nativité du Verbe ; mais ils ont sans aucun doute parlé de la même réalité. Je passerai, dit-il, et je verrai cette grande vision. Quelle vision ? Le feu dans le buisson. Et les bergers dirent : Passons jusqu’à Bethléem et voyons. Quoi ? Le Verbe qui a été fait. Qu’a-t-il été fait ? Ecoute l’Evangile : Le Verbe a été fait chair. Les bergers, que voulaient-ils voir ? Le Verbe dans la chair. Qu’est-ce que le Verbe ? Ecoute l’Evangile : Au commencement était le Verbe, et le Verbe était Dieu. Et Dieu, quel est-il ? Ecoute l’apôtre : Notre Dieu est un feu consumant (Hébreux 12,29). Les bergers voulaient voir le Verbe, c’est-à-dire Dieu, dans la chair ; Moïse, lui, voulait voir le feu, dans le buisson.

          Oserais-je maintenant dire que cette chair en laquelle était le Verbe, c’est-à-dire Dieu, autrement dit le feu consumant, oserais-je dire que cette chair était buisson ? Sans aucun doute, elle était buisson en lequel se trouvaient, non pas ses propres épines, mais les nôtres. Car, ce sont nos souffrances qu’il a portées, nos maladies dont il s’est chargé, et il a été transpercé à cause de nos péchés, et il a été broyé à cause de nos crimes.