Job 2, 1-13

La mystérieuse sagesse révélée par l’Esprit-Saint

Saint Bonaventure

Itinéraire de l’âme vers Dieu, V, 312-313, Sanctoral Franciscain,  p. 176s

 

          Le Christ est le chemin et la porte, l’échelle et le véhicule ; il est le propitiatoire posé sur l’arche de Dieu et le mystère caché depuis le commencement.

          Celui qui tourne résolument et pleinement ses yeux vers le Christ en le regardant suspendu à la croix, avec foi, espérance et charité, dévotion, admiration, exultation, reconnaissance, louange et jubilation, celui-là célèbre la Pâque avec lui, c’est-à-dire qu’il se met en route pour traverser la mer Rouge grâce au bâton de la croix. Quittant l’Egypte, il entre au désert pour y goûter la manne cachée et reposer avec le Christ au tombeau, comme mort extérieurement, mais expérimentant ce qui a été dit au larron compagnon du Christ : Aujourd’hui, tu seras avec moi dans le paradis.

          En cette traversée, si l’on veut être parfait, il importe de laisser là toute spéculation intellectuelle. Toute la pointe du désir doit être transportée et transformée en Dieu. Voilà le secret des secrets, que personne ne connaît sauf celui qui le reçoit, que nul ne reçoit sauf celui qui le désire, et que nul ne désire, sinon celui qui au plus profond est enflammé par l’Esprit-Saint que le Christ a envoyé sur la terre. Et c’est pourquoi l’apôtre dit que cette mystérieuse sagesse est révélée par l’Esprit-Saint.

          Si tu cherches comment cela se produit, interroge la grâce et non le savoir, ton aspiration profonde et non ton intellect, le gémissement de ta prière et non ta passion pour la lecture ; interroge l’Epoux et non le professeur, Dieu et non l’homme, l’obscurité et non la clarté ; non point ce qui luit mais le feu qui embrase tout l’être et le transporte en Dieu avec une onction sublime et un élan plein d’ardeur. Ce feu est en réalité Dieu lui-même dont la fournaise est à Jérusalem. C’est le Christ qui l’a allumé dans la ferveur brûlante de sa Passion. Et seul peut le recevoir celui qui dit avec Job : Mon âme a choisi le gibet, et mes os, la mort. Celui qui aime cette mort de la croix peut voir Dieu ; car elle ne laisse aucun doute, cette parole de vérité : L’homme ne peut me voir et vivre. Mourons donc, entrons dans l’obscurité, imposons silence à nos soucis, à nos convoitises, et à notre imagination. Passons avec le Christ crucifié de ce monde au Père.