Luc 1, 39-56

La rencontre

Origène

Traité sur l’Evangile de Luc, Livre II, 29, SC 45bis, p. 84s

         

          L’âme de Marie magnifie le Seigneur et son esprit tressaille en Dieu parce que, vouée âme et esprit au Père et au Fils, elle vénère, avec un pieux amour, le Dieu unique, d’où viennent toutes choses, et l’unique Seigneur, par qui sont toutes choses.

          Suit la prophétie de Marie, dont la plénitude répond à l’excellence de sa personne. Et il n’est pas sans intérêt, semble-t-il, qu’Elisabeth prophétise avant la naissance de Jean, Marie avant celle du Seigneur. Déjà se dessine et s’ébauche le salut des hommes, car le péché ayant commencé par la femme, le bien, aussi, débute par les femmes.

          Marie demeura chez Elisabeth environ trois mois, et s’en revint dans sa maison. Il est bien qu’on nous montre Marie rendant service et fidèle à un nombre mystique : car la parenté n’est pas la seule cause de ce long séjour, mais aussi le profit d’un si grand prophète. En effet, si la première entrée a procuré un tel résultat qu’au salut de Marie l’enfant ait tressailli dans le sein, que l’Esprit-Saint ait rempli la mère de l’enfant, quels accroissements pouvons-nous croire qu’en un tel espace de temps la présence de sainte Marie lui ait valus !

          Marie demeura chez Elisabeth environ trois mois. Ainsi le prophète recevait l’onction, et, tel un bon athlète, était exercé dès le sein maternel : car c’est en vue d’un grandiose combat que se préparait sa force.

          Enfin Marie est demeurée jusqu’à ce que fût accompli pour Elisabeth le temps de l’enfantement. Or, si vous y prenait bien garde, vous trouverez qu’on n’a jamais noté cela que pour la naissance des justes ; car enfin, les jours furent accomplis pour l’enfantement de Marie, le temps fut accompli pour l’enfantement d’Elisabeth, le temps de la vie s’est accompli quand les saints ont quitté la carrière de cette vie. La plénitude est pour la vie du juste, le vide pour les jours des impies.