Joël 3,1 – 4,8

L’annonce de la Pentecôte

Père Albert Gelin

Bible et Vie Chrétienne, 27, mai-juin 1959, p. 15

 

          Le premier discours de Pierre dans les Actes des Apôtres commente l’événement surnaturel de la Pentecôte : l’Eglise vient de naître dans l’effusion de l’Esprit qui précéda la théophanie de l’orage et du feu et qui suivit l’exultation des Douze, cette sobre ébriété, Ils sont pleins de vin doux (Actes 2,13), qui préluda à l’évangélisation de l’univers. Un texte se présente immédiatement à la pensée du chef des apôtres, celui que nous venons de lire chez le prophète Joël. L’événement, que les apôtres venaient de vivre, donnait à ce texte, vieux de quatre siècles, une soudaine jeunesse ; la joie qu’on y sentait vibrer s’adaptait bien au climat de l’Israël-de-Dieu (Galates 6,16) ; sa relecture chrétienne allait sans doute en spiritualiser les données et en agrandir les perspectives, mais ne changerait point son orientation foncière. C’est un fait général quant aux prophéties de l’Ancien Testament : les réalités apportées par le Christ n’y sont pas photographiées d’avance, mais l’Esprit qui inspire l’Ecriture, nous dirige vers elles avec sûreté.

          Le passage lu ouvre la deuxième partie du livre de Joël. Ce prophète a mis par écrit les paroles qu’il avait dites à l’occasion de la plaie des sauterelles et de la sécheresse ; cette mise par écrit se fit après l’heureux achèvement de ces calamités, le sujet des deux premiers chapitres, suivi de l’annonce développée du Jour de Yahvé, traitant du drame de la fin de ces derniers jours dont parle Pierre.

          Plus précisément le passage envisagé ne décrit pas seulement l’ouverture d’un drame, il nous en fait pressentir la péripétie essentielle, la lutte contre les forces païennes déchaînées et la victoire sur elles. C’est donc une vue synthétique qui est offerte à notre méditation et que le chapitre suivant ne fera qu’orchestrer et achever.

          La prophétie serait fortement particulariste et nationaliste si, dès cette époque, le prosélytisme n’avait laissé pressentir un élargissement du peuple de Dieu par adhésion. Il est remarquable en tout cas que la relecture de ce texte omet tout ce que la promesse avait de limitatif et ouvrant largement le Royaume à quiconque veut s’y convertir. Paul lira dans ce texte l’appel universel au salut : Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé (Romains 10,12-13).