Job 42, 7-17

Dieu et Job : vers plus d’humanité

Dany Nocquet

Le livre de Job, Aux prises avec la justice divine, p. 118s

 

          Bien des œuvres en littérature, illustrées par le personnage de Job, enrichissent, par leurs variétés, la fécondité de ce vieux livre. Elles mettent en évidence aussi une qualité rare des écrits de l’Ancien Testament : la qualité libératrice essentielle de ce livre biblique. Le livre de Job représente, à mes yeux, une œuvre qui libère le discours humain sur Dieu et la théologie. Il les libère du risque de vouloir tout dire ou tout savoir, de la tentation de toute emprise dominatrice ou du désir de possession. Le discours sur Dieu n’est pas de l’ordre du savoir qui viendrait objectiver, mettre Dieu à distance comme un objet qu’on scrute. Il est nécessaire que le discours sur Dieu soit aussi du domaine de la poésie, de la narration, de l’intériorité, qui peuvent rendre compte d’un ailleurs insaisissable, du moment d’une rencontre, ou du temps d’un dialogue dans un mystérieux face à face. Le livre de Job m’apparaît comme l’un des tout premiers ouvrages de théologiens qui assure que parler de Dieu c’est s’impliquer, cela se fait véritablement à partir de soi, d’une expérience existentielle.

          En faisant rupture avec l’idée d’un monde divin clos sur lui-même, hermétique et inaccessible, ou clôturé dans un livre, même aussi fondateur que la Torah, dont la tradition seule livrerait la compréhension définitive et totale, le livre de Job assure qu’une autre communication est possible entre Dieu et l’homme. Le livre de Job serait donc cette écriture qui devient parole quand les mots manquent. Une parole pour dire que Dieu parle aussi dedans, qu’il parle même quand je ne l’entends pas.

          Le livre de Job met en évidence le bien-fondé de la mise en mots de la révolte dans l’injustice de l’existence, et la nécessité vitale de dire la colère face à Dieu ou avec Dieu contre l’intolérable. La lecture proposée conduit à mettre en valeur l’aspect éthique du livre de Job. Il ya une invitation à la responsabilité : le cri ne dit pas seulement le malheur, il est déjà dépassement du mal, humanisation de ce qui semble insupportable et inhumain.