Job 40,6-24 + 42,1-6

Dieu conclut son discours

Père Jean Lévêque

Job et son Dieu, Tome II, p. 520s

 

          Dieu place Job devant une alternative, on ne peut plus nette : ou il pourra répondre, ou il devra céder. Job a disputé, critiqué ; il faut maintenant, pour l’honneur de Dieu, que le débat soit tranché : Job ne peut avoir raison qu’au prix d’une condamnation de Dieu. D’où la question de Dieu : Est-ce que tu ruineras mon droit ? Certains traduisent : Veux-tu vraiment casser mon jugement ? Mais il n’y a pas ici de jugement à casser, puisque Dieu s’est toujours gardé de porter la moindre sentence ! Il s’agit bien plutôt ici du bon droit de Dieu, de la légitimité de sa manière d’agir.

          Me condamneras-tu pour que tu aies raison ? Cette deuxième question de Dieu, tout de suite après la précédente, circonscrit et révèle en Job le péché du juste. Ce n’est pas un péché de type horizontal, produit par la rupture de l’ordre moral ou la violation d’un code éthique, mais c’est un péché, le péché de type vertical qui se manifeste au moment où la créature passe son créateur en jugement. Le juste doit choisir, un jour ou l’autre, entre l’affirmation de sa propre justice ou l’adoration inconditionnelle de la justice de Dieu : par sa négation de sa propre justice, l’homme accède à la justice selon Dieu, cette justice par la foi dont parlera saint Paul.

          Autant Dieu, tour à tour serein, amusé, attendri, a pris son temps pour décrire les œuvres de sa providence, autant maintenant il va droit à l’essentiel, et toute sa conclusion peut tenir en deux phrases : Tu n’as pas ma puissance (verset 9), Tu es incapable d’écraser les méchants (verset 12b).

          Job en effet n’a pas le bras comme celui de Dieu. En fait, l’image du bras de Dieu renvoie la plupart du temps aux interventions de Dieu dans l’histoire (Psaume 70,18-19), et d’autre part Tu es incapable d’écraser les méchants, c’est-à-dire de réaliser par toi-même la justice que tu réclames. Eliminer du monde toute fierté, tout orgueil, c’est le programme que Dieu s’est fixé ; Dieu propose alors à Job d’essayer son pouvoir : Orne-toi donc de fierté et de grandeur, revêts-toi d’honneur et de majesté ! (Verset 10).