Sur Siracide 17,15-32
Le Christ, Seigneur des morts et des vivants

Saint Augustin
Discours sur le psaume 144, OC 15, p. 412s

Le Seigneur est grand et entièrement digne de louanges (Ps 144,3). Quel degré voulait-il exprimer ? Quel terme voulait-il choisir ? Quelle pensée a-t-il renfermée dans ce mot entièrement ? Etendez votre conception aussi loin que vous le voudrez, comment embrasser par la pensée ce que rien ne peut contenir ? Il est entièrement digne de louanges et sa grandeur n’a pas de limites (Ps 144,3). Le prophète s’est servi du mot entièrement parce que la grandeur n’a pas de limites. De peur qu’en commençant à louer celui dont la grandeur n’a pas de limites, vous ne pensiez pouvoir mettre des limites à ses louanges. Ne croyez donc pas que vous puissiez jamais louer suffisamment Celui dont la grandeur n’a pas de limites. N’est-il pas mieux, puisqu’il n’a pas de limites, que sa louange n’en ait pas non plus ? Sa grandeur n’a point de fin, que votre louange n’ait point de fin. Qu’est-il dit de la grandeur de Dieu ? Sa grandeur n’a pas de limites. Qu’est-il dit de la louange que vous devez à Dieu ? Je louerai son nom dans le siècle et dans le siècle des siècles. De même donc que sa grandeur n’a pas de fin, ainsi vos louanges n’en auront pas non plus. En effet lorsque vous serez mort dans votre chair, vous ne cesserez pas de louer le Seigneur. Il est dit, sans doute : Les morts ne te loueront pas, Seigneur (Ps 113B,17), mais il s’agit de ces morts dont l’Ecclésiastique (17,26) a dit : La louange est inconnue des morts comme de ceux qui ne sont pas, et non de ceux dont le Sauveur a dit : Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra (Jean 11,25). Car le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac, le Dieu de Jacob n’est pas le Dieu des morts, il est le Dieu des vivants (Matthieu22,32). En effet, si vous ne cessez jamais de lui appartenir, jamais vous ne cesserez de le louer. Pouvez-vous craindre, tandis que, pendant votre vie, vous êtes à lui, de ne plus être à lui après votre vie ? Ecoutez ce que vous promet l’Apôtre : Si que nous vivons, nous vivons pour le Seigneur ; si que nous mourons, nous mourons pour le Seigneur. Soit que nous vivions, soit que nous mourions, nous sommes au Seigneur. Car c’est pour être Seigneur des morts et des vivants que le Christ est mort et qu’il a repris vie (Romains 14,8-9).