sur Sagesse 16, 2-26
Le relâchement dans le service de Dieu

Saint Charles Borromée
Saint Charles Borromée, Textes : Homélies, sermons et entretiens, p. 87s

Dans la vie spirituelle, un danger nous guette, le relâchement de la ferveur dans le service de Dieu. A première vue, cela vous semblera de peu de conséquence, et cependant, croyez-moi, nous sommes en présence d’un péril sérieux. Je ne parle pas des tièdes, mais de ceux qui sont parfaits et avancés dans la voie de Dieu, consommés dans la pureté de vie et dans la pratique des vertus héroïques. C’est chez ceux-là que le fléchissement de la ferveur première, quoique ténu et à peine perceptible, peut lentement produire des effets désastreux, parfois même en peu de temps causer la ruine complète de l’âme et la perte de tous les biens spirituels. Ce n’est pas moi qui le dis, mais l’Esprit Saint par la bouche de saint Jean (Apocalypse 3,17). L’évêque d’Ephèse était apparemment un personnage remarquable, puisqu’il recevait de Dieu même des louanges pour ses vertus. Il s’y ajoutait néanmoins un reproche : Tu t’es relâché de ta première charité. Il n’avait pas péché mortellement, il avait seulement laissé s’affadir sa première ferveur. Et qu’avait-il à craindre de ce relâchement ? Rien de moins que le retrait de ses vertus et des dons qu’il avait reçus, à moins qu’il ne fit pénitence et ne récupérât le zèle avec lequel il servait autrefois le Seigneur.
Que nul donc ne se confie dans ses progrès ! Il nous faut demeurer pieusement craintifs, car on a souvent vu tomber lamentablement ceux qui prenaient appui sur leurs propres bras. Je pourrais vous en citer mains exemples. Retenez seulement qu’il est extrêmement dangereux de ne point rejeter le péché à ses débuts et d’y persévérer. Apprenez avec quelle docilité vous devez obéir au Seigneur. Pleurez sur vous-mêmes, car vous avez été ordonnés pour ramener à Dieu les âmes des autres et souvent vous vous éloignez personnellement de lui par vos péchés.
Fasse notre Dieu très grand et très bon que les choses que nous avons dites aujourd’hui soient inscrites dans nos cœurs en lettres d’acier et n’en soient jamais effacées ! Animés d’une telle frayeur, attirons et conservons en nous-mêmes et en ceux qui nous sont confiés Notre Seigneur Jésus-Christ, à qui sont dus l’honneur et la gloire dans tous les siècles.