Sur Ruth 2, 14-23

La pauvreté, fondement de la vie spirituelle

Père Divo Barsotti

Ruth : la parole et l’esprit, Permets que je glane, p. 39s

 

A Bethléem, Ruth doit être sa propre pourvoyeuse et celle de sa belle-mère, non comme une femme libre du peuple d’Israël, mais comme une servante  qui vit de ce qu’elle gagne. L’humilité de cette condition semble être une bénédiction de Dieu. Ruth avait choisi le peuple d’Israël, avait choisi son Dieu : ce choix aurait dû, en principe, l’intégrer dans la vie du pays, et voici qu’au contraire tous la regardent comme une étrangère. Elle reste la « Moabite », elle demeure en marge de la nation que, pourtant, elle avait choisie. A l’époque de la rédaction du livre de Ruth, la pauvreté s’affirmait, en Israël, comme vertu fondamentale de la vie religieuse ; les fidèles de Dieu sont les « anawim », l’homme pieux est le pauvre ; la perfection en Israël est une vie d’abandon serein entre les mains de Dieu, et seul le pauvre peut tout attendre de Dieu. Dans l’Evangile aussi la pauvreté est bénie : la première Béatitude est celle des pauvres. Ruth n’a aucun droit : elle est étrangère, elle vit en marge de la nation, elle ne possède rien ; elle doit glaner dans les champs des autres pour vivre et faire vivre sa belle-mère. Cette pauvreté, humblement acceptée dans un pur abandon à Dieu, est l’expression de la vie religieuse ; c’est pourquoi, Ruth recevra de Dieu sa récompense.

Ayant abandonné sa religion, Ruth a choisi d’adorer le Dieu de Noémi, sa belle-mère ; désormais elle fait partie d’un peuple qui n’était pas le sien. Aussi le Dieu d’Israël la bénira. De fait, la bénédiction de Dieu atteint Ruth à travers Booz ; la réponse de Ruth à Booz nous fait saisir que Booz devient l’instrument d’une bénédiction divine, pour l’étrangère qui va glanant derrière ses moissonneurs.

Booz dit aux moissonneurs : Faites tomber des épis exprès, laissez-là les ramasser, et ne lui faites pas de reproches. Quelle délicatesse dans ce geste de Booz ! Il ne lui fait pas un cadeau : il veut la favoriser sans que cela paraisse. Donc son geste est un geste de charité, un geste gratuit. IL lui eût été facile de donner un sac d’orge ; il veut au contraire que ce don soit le fruit du travail de la jeune femme. Laisser tomber des épis pour qu’elle puisse plus facilement remplir son sac : quelle délicate générosité !

Soulignons le fait religieux certes, mais aussi la noblesse du geste. Alors la pureté du dévouement de Ruth est contagieuse : il semble que Booz apprenne de Ruth à aimer. Et Ruth retourne chez sa belle-mère avec un sac rempli.