Sur Matthieu 1, 18-24
Joseph, le père de Jésus

Daniel Marguerat
Jésus et Matthieu, p. 270s

Joseph, fils de David, ne crains pas ne prendre chez toi Marie, ta femme : ce qui a été engendré en elle vient de l’Esprit Saint. Arrêtons-nous sur cette demande totalement surprenante ! Une demande même très inconvenante ! Il y a les choses qui se font, et les choses qui ne se font pas ! Et là, l’ange dépasse les bornes…
Tout d’abord, l’ange demande de ne pas renvoyer Marie. C’est agir à contre-courant des règles juives du temps, à contre-courant de la sainte Torah. Ce qui est révélé à Joseph, c’est que la fidélité à Dieu ne consiste pas à suivre à tout prix les règles morales, des principes même les mieux établis, mais à suivre ce que Dieu attend de lui à ce moment-là. S’ouvrir à une obéissance inattendue.
Et que demande encore Dieu ? De donner un nom à l’enfant : Tu lui donneras le nom de Jésus. Dieu demande à Joseph d’être le père de Jésus, parce donner un nom à son enfant, c’est le reconnaître publiquement comme son fils. Dieu a demandé à Joseph de faire une place à Jésus, de lui donner une famille, de s’engager à l’aimer. Il lui a demandé d’endosser cette vocation à la fois merveilleuse et éprouvante d’être père, d’être là, permettant à son fils de devenir adulte.
Et Joseph a accepté. Il a permis ainsi à Jésus de prendre sa place dans la communauté humaine, au sein de cette bourgade qu’est Nazareth. Cela n’a pas été facile. L’évangile le raconte aussi : Jésus a été menacé dès sa naissance par la colère meurtrière d’Hérode, et Joseph averti en rêve a sauvé Jésus de la mort en entraînant Marie et son fils en Egypte. Il a aussi permis à son fils de devenir un homme, en lui donnant comme tous les pères juifs une instruction religieuse ; il l‘a présenté au Temple suivant la coutume pour consacrer au Seigneur le premier-né de la famille ; il l’a fait circoncire. Et puis, il lui a donné un métier, son métier, constructeur du bois. Et comme tous les pères, ou du moins comme tous les pères le devraient, Joseph a beaucoup aimé et lutté, hésité et prié, espéré et souffert, pour que son fils devienne un homme. Il a pris sur lui ce risque d’être père, fort et fragile à la fois, attentif, nécessaire.
Etonnant chemin de Dieu ! Pour faire naître le Christ Sauveur, pour apporter le salut à l’humanité, Dieu a eu besoin des gestes et de la fidélité de ce charpentier de Nazareth. Non, Joseph n’a pas été un figurant. Il nous révèle le véritable visage de l’obéissance.