Sur Matthieu 10, 17-22
Le martyre d’Etienne et la Passion de Jésus
Saint Augustin
Sermon 315, pour la fête de saint Etienne, p. 39s

Quelle ressemblance entre le martyr d’Etienne et la Passion de son Seigneur, de son Sauveur ! Nous voyons de faux témoins venir déposer contre lui comme ils avaient déposé contre Jésus-Christ et sur le même sujet. Vous le savez, vous n’avez pas oublié ce dont les faux témoins accusaient Notre-Seigneur Jésus-Christ : Nous lui avons entendu dire : Je détruirai ce temple et en trois jours j’en rebâtirai un autre. Or, ce n’est pas ce que notre Seigneur avait dit, mais le mensonge voulut se rapprocher de la vérité. En quoi furent-ils de faux témoins ? Ils lui avaient entendu dire : Détruisez ce temple et en trois jours je le rebâtirai. Et l’évangéliste ajoute : Or il voulait parler du temple de son corps. Ce sont de faux témoins parce qu’à cette expression : Détruisez, ils ont substitué cette autre : Je détruis. Ils ont fait un léger changement de syllabes, mais leur faux témoignage est d’autant plus perfide, que, pour donner plus de poids à leur accusation, ils ont cherché à lui donner les couleurs de la vérité. Et de quoi les faux témoins accusent-ils Etienne ? Nous les avons entendus dire que ce Jésus de Nazareth détruira ce lieu et changera les traditions de la Loi. Ils faisaient un faux témoignage et prophétisaient vrai. Ils ressemblaient à Caïphe, leur maître, ce prince des prêtres qui, conseillant aux Juifs de mettre à mort Jésus Christ, leur disait : Il est bon qu’un homme meure pour le peuple, et non pas que toute la nation périsse. Or, ajoute l’évangéliste, il ne dit point cela de lui-même, mais étant grand prêtre cette année-là, il prophétisa que le Christ devait mourir pour la nation. Pourquoi cela, mes frères ? Ah ! C’est que la force de la vérité est grande. Les hommes haïssent la vérité, et ils prophétisent la vérité sans le savoir. Ils n’agissent point d’eux-mêmes, ils sont de simples instruments. Ces faux témoins qui s’élevèrent contre Etienne étaient donc semblables aux faux témoins pour qui le Christ fut mis à mort.
Ces faux témoins, pour donner plus d’autorité au jugement d’Etienne, l’amenèrent devant le grand Conseil. Or, cet ami du Christ, lorsqu’il eut exposé sa cause, publia hautement la vérité de son divin Maître. Il allait mourir, pourquoi cette langue, inspirée par la piété, serait-elle restée muette devant des impies ? Pourquoi aurait-il refusé de mourir pour la vérité ? C’est par ce côté seul qu’il diffère du Seigneur, dans son martyre si semblable à celui de Jésus Christ. Pourquoi ? Parce que Jésus Christ est Dieu, et sa majesté est au-dessus de tout. Lorsque le Sauveur fut conduit devant ses juges, il aima mieux ne pas répondre à leurs questions et se taire. Etienne, lui, préféra parler. Pourquoi ? A cause de la recommandation du Sauveur : Ce que je vous dis dans les ténèbres, dites-le à la lumière ; ce que vous entendez à l’oreille, prêchez-le sur les toits.