Sur Romains 2, 1-16
« La bonté de Dieu te pousse au repentir »
Saint Augustin
Traités sur l’Evangile de Jean, Traité 33, 7, OC 9, p. 610s

Le Seigneur est douceur et droiture. Tu aimes qu’il soit doux ? Crains sa rectitude. Dans sa mansuétude, il dit : Je me tais, mais dans sa justice : Est-ce que je me tairais toujours ? Miséricordieux et faisant miséricorde le Seigneur ? Très certainement ; ajoute encore : patient, et riche en miséricorde ; crains la finale : et véridique. Ceux que maintenant il supporte pécheurs, il les jugera pour leur mépris : Méprises-tu ses richesses de bonté, de patience, de longanimité sans reconnaître que cette bonté de Dieu te pousse au repentir ? Oui, le Seigneur est doux, le Seigneur est patient, le Seigneur est miséricordieux, mais le Seigneur est aussi plein de justice et de vérité. Il te donne le temps de te corriger, mais tu aimes mieux jouir de ce délai que de changer de vie. Tu as été mauvais hier, sois bon aujourd’hui ; tu as fait le mal aujourd’hui, cherche à changer demain de conduite. Tu attends toujours beaucoup de la miséricorde de Dieu comme si Celui qui a permis le pardon au repentir t’a aussi promis une plus longue vie ? Qui t’assure ce que demain sera pour toi ? Tu dis avec raison : Quand je changerai de vie, Dieu me pardonnera tous mes péchés. Nous ne pouvons nier que Dieu n’ait promis le pardon à ceux qui se convertissent et qui changent de vie.
Les hommes viennent donc ici se briser contre deux écueils, contre l’espérance présomptueuse et contre le désespoir, deux choses diamétralement opposées et qui viennent de sentiments contraires. L’espérance trompe celui qui dit : Dieu est bon, Dieu est miséricordieux ; je ferai donc ce qui me plaît, ce qui m’est agréable, je lâcherai les rênes à mes passions, je satisferai les désirs de mon âme. Pourquoi cela ? Parce que Dieu est miséricordieux, parce que Dieu est bon, parce que Dieu est doux. C’est cette espérance présomptueuse qui les expose aux plus grands dangers. Ceux qui désespèrent au contraire, lorsqu’ils tombent dans les fautes graves, pensent qu’elles ne leur seront point pardonnées.
Que fait le Seigneur avec ceux que l’une de ces maladies met en danger ? A ceux que l’espérance aveugle, il dit : Ne tarde pas à te convertir. A ceux au contraire que le désespoir abat, que dit-il ? Si le pécheur se détourne du péché pour pratiquer le droit et la justice, il assure sa vie. A ceux donc dont que le désespoir va perdre, il offre le port de la miséricorde ; à ceux que la présomption aveugle et qui sont le jouet de leurs continuels délais, il a caché le jour de leur mort. Vous ne savez pas reconnaître la grâce de Dieu qui vous donne ce jour actuel pour changer de vie. Assurés du pardon de Dieu pour le passé, mettons-nous en garde pour l’avenir.