Jérémie 1, 4-10 + 17-19

Jean, la lampe du Christ

Saint Bernard

Sermon pour la Nativité de saint Jean-Baptiste, p. 33s

 

          Frères, écoutez ce que Notre Seigneur Jésus a dit de Jean, dont on célèbre aujourd’hui la nativité : Jean fut la lampe ardente et luisante (Jean 5,35). Grand témoignage, car grand est celui à qui il est rendu, et plus grand encore celui qui le rend. Luire seulement est inutile, chauffer seulement c’est peu ; mais luire et chauffer ensemble, c’est la perfection. Ecoutez l’Ecriture : Le sage demeure comme le soleil, l’insensé change comme la lune. C’est que la lune luit sans donner de chaleur ; de plus elle paraît tantôt pleine, tantôt petite, et il lui arrive de disparaître complètement. En effet, une lumière empruntée n’est pas stable, elle croît, décroît, s’affaiblit et s’éclipse. Le Seigneur exige de tous, non l’éclat, mais la ferveur ; ne nous a-t-il pas dit : Je suis venu apporter le feu sur la terre, et quel est mon désir sinon qu’il s’allume ?

          Le Seigneur a dit aux apôtres et aux hommes apostoliques : Que votre lumière brille devant les hommes. Cette parole a été dite aussi à Jean-Baptiste. Mais les apôtres l’ont entendue frapper à leurs oreilles, tandis que Jean, comme un ange, a été éclairé en esprit. En effet, il est d’autant plus près de Dieu que la voix est plus voisine et n’a pas besoin de l’intermédiaire d’une autre voix. Ce n’est pas la prédication, c’est l’inspiration qui a instruit Jean rempli de l’Esprit Saint dès les entrailles de sa mère ; il était si fortement embrasé du feu céleste, qu’il connût alors le venue de Jésus-Christ. Ce feu nouveau, fraîchement descendu du ciel, des lèvres de Gabriel était entré dans l’oreille de la Vierge, et de l’oreille d’Elisabeth il pénétra jusqu’à l’enfant ; à partir de cette heure, l’Esprit-Saint remplit ce vase d’élection qu’était Jean afin de préparer une lampe au Christ, le Seigneur. C’était donc une lampe ardente, mais encore cachée sous le boisseau, en attendant le jour où, placée sur le chandelier, elle luirait aux regards de tous dans la maison de Dieu. En ce temps-là, cette lampe ne pouvait encore éclairer que le boisseau qui l’enfermait, luisant uniquement que pour sa mère, lui révélant par ses tressaillements le grand mystère de la Miséricorde. Jean s’est révélé à nous par ses œuvres : Et toi, enfant, tu marcheras  devant le Seigneur pour lui préparer la voie, et par ses paroles il nous a révélé Jésus-Christ en le montrant : Voici l’Agneau de Dieu.