1 Samuel 1,20-28 + 2,11-21

La réfutation des hérésies

Pape Benoît XVI

Les Pères de l’Eglise de Clément de Rome à Maxime le Confesseur, p. 27s

 

          Irénée est avant tout un homme de foi et un pasteur. Du bon Pasteur, il a le sens de la mesure, la richesse doctrinale, l’ardeur missionnaire. Comme « écrivain, il poursuit un double objectif : défendre la vraie doctrine contre les assauts des hérétiques, et exposer avec clarté les vérités de la foi. Correspondent exactement à ses fins les deux œuvres qui nous restent de lui ; les cinq livres Contre les Hérésies et l’Exposé de la prédication évangélique. En définitive, Irénée est le champion de la lutte contre les hérésies. L’Eglise du II° siècle était menacée par ce qu’on dénomme la gnose, une doctrine qui affirmait que le dogme enseigné par l’Eglise ne serait que symbolique, à l’usage des gens simples et incapables de comprendre des choses difficiles ; alors que les initiés, les intellectuels, les gnostiques comme on les appelait, auraient, eux, été capables de comprendre ce qui se trouvait derrière ces symboles, et auraient de la sorte constitué un christianisme élitiste, intellectualiste. Il est naturel que ce christianisme intellectuel se soit fragmenté toujours plus en courants de pensée divers, souvent étranges et extravagants, mais attrayants pour beaucoup. Un élément commun à ces divers courants était le dualisme, par lequel on niait la foi en un Dieu unique, Père de tous, Créateur et Sauveur du monde et de l’homme ; et, pour expliquer la présence du mal dans le monde, on affirmait l’existence, à côté du Dieu bon, d’un principe négatif. Ce principe négatif aurait produit les choses matérielles, la matière.

          S’enracinant fermement dans la doctrine biblique de la création, Irénée réfute le dualisme et le pessimisme gnostique qui dévaluaient les réalités corporelles. Il revendiquait sans hésitation la sainteté originelle de la matière, du corps, de la chair, tout autant que de l’esprit. Mais son œuvre va bien au-delà de la réfutation des hérésies : on peut dire, en effet, que se présente avec lui le premier grand théologien de l’Eglise, celui qui a créé la théologie systématique ; il parle d’ailleurs lui-même du système théologique, c’est-à-dire de la cohésion interne de toute la foi. Au centre de sa doctrine se trouve la question de la règle de la foi et de sa transmission. Pour Irénée, la règle de la foi coïncide pratiquement avec le Credo des Apôtres, et elle nous donne l’interprétation de l’Evangile et du Credo à la lumière de l’Evangile. Le Symbole des Apôtres, qui est une sorte de synthèse de l’Evangile, nous aide à comprendre ce qu’il veut dire, comment nous devons lire l’Evangile lui-même.