2 Corinthiens 5,11-21 ou Proverbes 31,10-31

Marie-Madeleine

Père Alain Marchadour

Pierre Debergé, La Bible et ses personnages, Marie-Madeleine, p. 231s

 

          Le parcours de Marie-Madeleine rejoint celui de beaucoup de croyantes d’aujourd’hui à la fois dans leur désir de proximité avec Jésus. Déjà au XV° siècle, la mère Jeanne de la Croix (1481-1543), franciscaine de Cuba, se vit contrainte de légitimer son autorité à prêcher malgré son sexe, et de répondre à l’objection de ceux qui s’étonnaient que Dieu ait choisi de parler par la bouche d’une femme pauvre et petite. Elle répondit : Jésus a voulu, pour sa résurrection glorieuse, être attesté par des hommes et par des femmes : Marie-Madeleine fut l’objet de son apparition avant toute autre personne, sauf sa glorieuse mère. Sainte Thérèse d’Avila se rêvait en Marie-Madeleine lavant les pieds du Maître et répandant le parfum. Sainte Brigitte de Suède transmet de la part de Jésus cette révélation : il y a trois saints qui m’ont plu au-dessus des autres : saint Marie ma mère, saint Jean-Baptiste et sainte Marie-Madeleine.

          Si Marie de Magdala rejoint presque Marie, la mère de Jésus, dans l’imaginaire des hommes, cela tient à la fois à des facteurs extratextuels, liés à l’horizon d’attente des lecteurs tout au long de l’histoire, mais aussi à la puissance du texte lui-même, en particulier dans l’écriture de Jean. En jouant sur les mots, on pourrait dire que Marie-Magdala, c’est la passante qui court d’un lieu à l’autre à la recherche de celui qu’elle aime, celle qui passe, mais c’est aussi un chef de file, quelqu’un qui permet au lecteur de faire le passage qu’elle a fait la première. Marie de Magdala, a-t-on dit, est représentée à la fois comme une disciple concrète, premier témoin de la résurrection, un paradigme intemporel. Si quelqu’un m’aime, il observera ma parole et mon Père l’aimera ; nous viendrons à lui et nous établirons chez lui notre demeure ; à la lumière de ces paroles sans frontières de Jésus en Jean (14,21-23), l’expérience qu’a faite, de la résurrection de Jésus, Marie-Madeleine devient, pour tous les temps, un modèle de l’expérience de Dieu. Finalement, comme femme aimante, elle est la figure en qui la communauté peut s’identifier. En elle, la communauté comprend comment la relation de foi postpascale à Jésus peut être vécue : comme une rencontre d’amour qui est rendue possible et enveloppée à travers la relation immanente réciproque des croyants et de Jésus dans le Père.