Amos 1,1 – 2,3

Amos, un témoin de Dieu

Père Gaston Brillet

Amos et Osée, p. 24s

 

                   Dans le village de Tékoa, sur une haute colline, au bord du désert, à 8 ou 9 kilomètres au sud de Bethléem, vivait un berger. Il cultivait aussi les sycomores dans les vallons des rudes hauteurs vers la plaine maritime. Il s’appelait Amos. Toute son histoire tient en deux lignes de l’éditeur de ses poèmes et en deux mots de lui qui nous ont été conservés par hasard. Il faut conjecturer tout le reste.

                Mais plutôt, nous connaissons son âme. Nous la connaissons dans le détail de ses replis et dans sa profondeur. Et nous la connaissons par lui.

                D’abord, ne nous représentons pas un berger de ce temps et de ce pays selon les images de notre pays et de notre temps. Un berger, en Israël et à cette époque, est assez facilement un poète et un musicien, comme David ; il connaît les chants et les poèmes de son pays, de sa profession, de la vie des villages, de l’épopée nationale, des traditions religieuses. Il sait raconter des récits et proposer des énigmes ; il possède des trésors de proverbes et de paraboles. Il aiguise son esprit dans les rencontres avec les autres bergers et les hommes des chants et des bourgs. Il a acquis l’art de la sentence fine et souple comme un jonc, acérée comme une flèche, sculptée comme une racine ou un tronc d’arbuste, et il y a, dans sa parole, toutes les richesses d’expérience d’une vie attentive et soucieuse, toutes les couleurs des choses et les nuances de la lumière.

                Avec cela, par goût, par amour du pays et des gens, surtout par zèle religieux, il s’informe ; il apprend sur les chemins, aux carrefours, dans l’ombre favorable des portes des villes ou sur les places, comment vont les événements de la guerre et de la paix, de l’existence des petits et des grands. Il apprend la misère croissante des pauvres, que les riches dépouillent un peu plus chaque jour, champ, moisson, enfants, liberté, à l’occasion d’une sécheresse ou d’une inondation, de la mort du chef de famille ou du fils aîné.

                Surtout, ce sont les choses de Dieu qui l’intéressent ; c’est dans son humble monde que se cultivent les grands souvenirs des gestes de Dieu en Israël. Pressentant, prévoyant l’avenir, le prophète vit avec le passé : le temps du désert est encore proche pour lui ; il le contemple et il y puise des leçons. Ce sera la sagesse d’Amos et sa force de maintenir ce qui ne doit pas passer pour préparer ce qui vient.