Amos 2, 4-16

La justice sociale

Père Jésus Asurmendi

Amos et Osée, CE 64, p. 13s

 

                   Pour bien définir la trame théologique de l’oracle que nous venons d’entendre, il faut définir précisément les accusations portées contre Israël. Toutes se situent dans le domaine de la justice sociale. La première accusation : Ils vendent le juste pour de l’argent, et les indigents pour une paire de scandales, vise peut-être la corruption des tribunaux, mais plus probablement s’agit-il de la vente comme esclaves des pauvres gens qui ne peuvent s’acquitter de leurs dettes, la sécheresse mettant les paysans pauvres à la merci des riches. Dans l’hypothèse d’une allusion à la vente comme esclave d’un juste, le texte pourrait se référer à la vente de l’enfant d’un débiteur insolvable. L’esclavage n’était pas interdit en Israël. Le prophète dénonce sans doute la disproportion entre le délit légal et la sanction. Cette dénonciation montrerait clairement la dégradation des rapports sociaux en Israël.

                   La première partie de l’accusation du verset 7 est d’ordre général, étant précisé que l’expression tordre le chemin des humbles stigmatise la perversion des tribunaux. Dans la seconde partie de ce verset, il s’agirait sans doute des abus sexuels, par le père et le fils, d’une même esclave. L’accusation du verset 8 se réfère au fait que, d’après Exode 22,25, on doit remettre le soir le manteau pris en gage. Les versets 7 et 8, en ajoutant un aspect religieux à la faute dénoncée, soulignent la mascarade du culte ainsi pratiqué.

                   Le constat des méfaits d’Israël dressé, on passe à l’énumération des actions bénéfiques de Dieu. Il a sauvé le peuple et lui a donné les moyens de vivre en le traitant comme un partenaire, alors que les Israélites ravalent leurs frères au rang d’objets, de marchandises dont on peut tirer bénéfice. Le contraste théologique est flagrant.

                   La logique du texte est simple : les Israélites devraient suivre l’exemple de Dieu dans leurs relations. Le comportement que Dieu attend d’Israël en réponse à ses bienfaits se situe donc, dans cet oracle, au niveau du comportement social. On aurait pu penser que la réponse du peuple aux bienfaits dispensés par Dieu relevait de la louange liturgique. Le texte n’exclut pas cette option, mais il n’évoque explicitement que le comportement social des Israélites. On répond à Dieu dans les rapports sociaux.

                   La conséquence de l’exposé s’impose d’elle-même : la relation est rompue. Celui qui est à l’origine de cette relation l’interrompt. Il était en droit d’attendre autre chose. Il est trompé et il va rendre la pareille. Il va se comporter avec les Israélites comme ceux-ci le font avec leurs frères : les écraser.