Matthieu 10, 17-22

Prière d’Etienne pour ses bourreaux

Saint Augustin

Œuvres Complètes, tome 19, Sermon 317, IV, p. 53s

 

          Notre Seigneur fait aux Juifs d’amers et de durs reproches, mais qui lui sont inspirés par l’amour. Malheurs à vous, scribes et pharisiens hypocrites. Qui ne croirait que ces paroles ne sortent d’un cœur profondément irrité ? Il monte sur la croix et fait cette prière : Mon Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font. Etienne adresse d’abord aux Juifs de sévères reproches : Hommes à la tête dure et incirconcis de cœur, tels sont les paroles qu’il leur adresse ! Hommes à la tête dure et incirconcis de cœur, vous résistez toujours à l’Esprit Saint, comme vos pères. Lequel des prophètes n’ont-ils pas mis à mort ? Ce langage semble inspiré par la haine, par la colère. Mais non, la sévérité est dans les paroles, l’amour dans le cœur. Nous avons entendu les accents de la sévérité, montrons maintenant que l’amour est dans le cœur. Lorsque les Juifs coururent aux pierres dont ils avaient la dureté, ils lancèrent contre Etienne ces pierres auxquelles ils ressemblaient. Etienne était écrasé sous les pierres, lui qui mourait pour la Pierre, au témoignage de l’apôtre : Or, la pierre était Jésus-Christ. En présence de cette fermeté qu’il fait paraître dans ses discours, considérez la patience dont il fait preuve dans sa mort. Son corps était violemment ébranlé sous cette grêle de pierres, et il priait pour ses ennemis ! L’homme extérieur était broyé, l’homme intérieur était en prières. Mais le Seigneur qui l’avait armé, qui l’avait éprouvé, qui avait marqué de son caractère sacré non pas sa main, mais son front, regardait du haut du ciel son généreux soldat, pour le soutenir au milieu du combat et le couronner après la victoire. Il daigne même se manifester à lui : Voici, dit Etienne, que je vois les cieux ouverts et le Fils de l’homme debout à la droite de Dieu. Il était seul pour le voir, parce que c’est à lui seul que Jésus se manifestait. Et quelle prière faisait-il pour lui ? Seigneur, reçois mon esprit. Lorsqu’il prie pour lui-même, il reste debout ; prie-t-il pour ses ennemis, il se met à genoux ; pour lui, il reste droit, pour eux, il s’abaisse ; pour lui, il reste haut, pour eux, il s’humilie, il fléchit les genoux et dit : Seigneur, ne leur compte pas ce péché. Après cette parole, il s’endormit dans le Seigneur. Ô sommeil de paix ! S’il s’est ainsi endormi sous les pierres que lui jetaient ses ennemis, quelle ne sera pas sa vigilance sous ces cendres sacrées ? Il s’est endormi avec calme, dans une paix profonde parce qu’il a recommandé son âme au Seigneur.