Zacharie 10,6 – 11,3

La joie chrétienne

Saint Paul VI

Exhortation «  Gaudete Domino », Documents Pontificaux, 1975, p. 250s

 

          Comment ne pas rappeler, image lumineuse pour notre temps, l’exemple du bienheureux Maximilien Kolbe, pur disciple de saint François ? Dans les épreuves les plus tragiques qui ensanglantèrent notre époque, il s’offrit volontairement à la mort pour sauver un frère inconnu, et les témoins nous rapportent qu’au lieu de souffrances qui était habituellement comme une image de l’enfer, sa paix intérieure, sa sérénité et sa joie firent en quelque sorte, pour ses malheureux compagnons, comme pour lui-même, l’antichambre de la vie éternelle.           Dans la vie des fils de l’Eglise, cette participation à la joie du Seigneur n’est pas dissociable de la célébration du mystère eucharistique, où ils sont nourris et abreuvés de son corps et de son sang. Car, soutenus ainsi, comme des voyageurs, sur la route de l’éternité, ils reçoivent déjà sacramentellement les prémices de la joie eschatologique.

          Située dans une telle perspective, la joie vaste et profonde répandue dès ici-bas dans le cœur des vrais fidèles ne peut apparaître comme diffusive de soi, tout comme la vie et l’amour dont elle est un heureux symptôme. Elle résulte d’une communion toujours plus universelle. Elle ne saurait en aucune manière inciter celui qui la goûte à quelque attitude de rempli sur soi. Elle donne au cœur une ouverture catholique sur le monde des hommes, en même temps qu’elle le blesse de la nostalgie des biens éternels. Elle approfondit chez les fervents de la conscience de leur condition d’exil, mais les garde de la tentation de déserter le lieu de leur combat pour l’avènement du Royaume. Elle les fait se hâter activement vers la consommation céleste des noces de l’Agneau. Elle est paisiblement tendue entre l’instant du labeur terrestre et la paix de la demeure éternelle, conformément à la loi de gravitation de l’Esprit : Si donc, dès à présent, pour avoir reçu ces arrhes de l’Esprit filial, nous crions : Abba, Père !, que sera-ce lorsque, ressuscités, nous le verrons face à face ?