Sur Actes 11, 1-18
Le combat intérieur et extérieur
Aelred de Rievaulx
Sermons pour l’année 2, Pain de Cîteaux 12, p. 30s

Le saint que nous célébrons en ce jour a affronté un double combat, à la fois intérieur et extérieur. Nous, nous n’en affrontons qu’un seul, le combat intérieur. Saint Pierre, comme vous le savez, n’eut pas seulement à affronter le combat spirituel contre le lion qui rôde cherchant à dévorer, mais il a mené aussi le combat extérieur contre Simon le Magicien, contre le cruel Néron, contre les supplices et les persécutions des méchants. Il avait bien écouté la voix de son chef qui avait dit : Sois fort dans la guerre. C’est pourquoi il a bien combattu, bien vaincu, et il a reçu la récompense de sa victoire.
Vous aussi, frères, soyez forts dans la guerre. N’abandonnez pas le terrain de combat, car il est ici le terrain de combat. Tenez-vous dans la citadelle qui est la vôtre, dans la maison qui est la vôtre ; que chacun tienne bien son poste pour le défendre. Il y a en effet divers postes dans cette citadelle, et à chacun a été assigné un poste bien précis pour qu’il en assure la garde. Que personne donc, pour la partie qui lui revient, ne laisse entrer l’ennemi. Les cloîtriers, c’est-à-dire les moines, ont tel poste, certains sont chargés d’une obédience, les supérieurs une autre encore. Que chacun assure bien la garde de son poste, qu’il veille autant qu’il peut à ce que l’ennemi n’entre pas.
Le poste que les cloîtriers doivent défendre et protéger contre les ennemis, c’est l’observance régulière. Il leur revient de veiller à ce que l’ennemi ne puisse pas trouver quelque brèche dans cette observance régulière, par où il pourrait entrer. Ils doivent être attentifs à ce qu’aucune paresse ne se glisse dans le travail, de peur que l’ennemi n’entre par là et ne mette en pièces l’important rempart qui nous protège de nos ennemis les plus terribles : l’acédie et la tristesse. Ils doivent soigneusement prendre garde à ce qu’aucun soulagement superflu ne vienne faire voler en éclats notre abstinence, et que trop de somnolence ne réduise à rien les veilles. Ces moines doivent également veiller soigneusement au silence : s’il vient à être entamé et émoussé, l’ennemi entrera aussitôt par les querelles, les rivalités, et les disputes.
Le poste des moines chargé d’une obédience, c’est la charité, la miséricorde, le soin des hôtes et des pauvres, et autre chose du même genre. Il est donc nécessaire qu’ils gardent leur poste et qu’ils interdisent à l’ennemi d’entrer par la dureté ou l’avarice. Qu’ils pourvoient à ce qui est bien, non seulement devant Dieu, mais encore aux yeux de tous les hommes, afin qu’en toutes choses Dieu soit glorifié.