Sur Ac 2,42 – 3,11

Une célébration continue de la Pâque
Père Louis Bouyer
Le Mystère pascal, p. 9-11

Dire que les fêtes pascales sont le centre de l’année ecclésiastique, cela n’est pas assez ; elles sont le foyer où tout converge, et la source de laquelle tout découle.
Le culte chrétien n’est qu’une célébration continue de la Pâque : le soleil qui ne cesse de se lever sur la terre traîne après lui un sillage d’eucharisties qui ne s’interrompt pas un seul instant, et chaque eucharistie célébrée, c’est la Pâque qui se prolonge. Chaque jour de l’année liturgique, chaque instant de la vie de l’Eglise continue et renouvelle cette Pâque que le Seigneur avait désiré d’un si grand désir manger avec les siens, en attendant celle qu’il mangera dans son royaume avec eux et qui se prolongera durant l’éternité. La Pâque annuelle que nous ne cessons, ni de nous remémorer, ni d’attendre, nous maintient sans relâche dans le sentiment des premiers chrétiens qui s’écriaient, tournés vers le passé : Le Seigneur est vraiment ressuscité ! , et tournés vers l’avenir : Viens, Seigneur Jésus, viens bientôt !
La religion chrétienne n’est pas simplement une doctrine, elle est en fait une action, non pas action passé, mais une action du présent où le passé se retrouve et où l’avenir s’approche. C’est en cela qu’elle renferme un mystère de foi, car elle nous affirme que devient nôtre aujourd’hui l’action qu’un Autre a accompli jadis et dont nous ne verrons les fruits en nous que plus tard… Car le Christ est mort pour nous, non pas afin de nous dispenser de mourir, mais bien plutôt pour nous rendre capables de mourir efficacement : de mourir à la vie du vieil homme pour revivre à celle de l’homme nouveau qui ne meurt plus.
Là est le sens de la Pâque : elle nous enseigne que le chrétien doit mourir avec le Christ pour ressusciter avec lui. Et elle ne fait pas que l’enseigner, elle l’opère. La Pâque, c’est le Christ qui est mort et ressuscité une fois, nous faisant mourir de sa mort et nous ressuscitant à la vie. Ainsi la Pâque n’est-elle pas une simple commémoraison ; elle est la Croix et le Tombeau vide rendus présents. Mais maintenant ce n’est plus le Chef qui doit s’étendre sur la croix pour se relever du tombeau, c’est son corps, l’Eglise, et dans ce corps c’est chacun de ses membres que nous sommes. Cette mort avec le Christ et cette résurrection avec lui, nous donnant la vie cachée avec le Christ en Dieu qui paraîtra lorsque le Christ lui-même paraîtra, c’est là tout le mystère dont saint Paul nous dit que Dieu l’avait réservé pour ces derniers temps, les nôtres. On a souvent souligné l’extraordinaire abondance des composés en « avec » sous la plume de saint Paul, et l’on a remarqué justement que c’est un trait caractéristique de toute sa conception de la vie chrétienne. En effet, pour lui, la vie chrétienne, vie de l’Eglise ou vie de chaque chrétien, est une vie avec le Christ.