Sur Jérémie 20, 7-18
Dans la croix, il y a la mort et il y a la vie
Aelred de Rievaulx
Sermons pour l’année 3, Pain de Cîteaux 18, sermon 36, p. 112

Notre Seigneur Jésus Christ a opéré notre salut, non pas d’une seule façon, mais, sans aucun doute, de plusieurs manières. Puisque sa miséricorde avait prévu notre rédemption, il a opéré celle-ci de telle sorte qu’elle nous serve également d’exemple. Voici qu’en ce moment, mes frères, vous faites mémoire de cette rédemption, la nôtre ; regardez donc attentivement non seulement vers la rédemption en elle-même, mais aussi vers ces deux réalités : la manière dont elle s’est faite et l’endroit où elle a eu lieu. La manière dont s’est faite la rédemption, c’est la souffrance de la croix ; l’endroit où elle a eu lieu, c’est hors de la cité.
Nous devons savoir cela, car c’est d’après la manière dont s’est réalisée la rédemption que nous avons, d’une part, à adopter une manière de vivre, et, d’autre part, à choisir un lieu approprié pour vivre ainsi.
Maintenant donc, à partir de cette croix de Jésus, adoptons une manière de vivre. Dirais-je manière de vivre ou manière de mourir ? Bien plutôt, manière de vivre et manière de mourir. Manière de mourir au monde et de vivre pour Dieu, manière de mourir aux vices et de vivre aux vertus, de mourir à la chair, mais pour vivre de l’Esprit.
Ainsi donc, dans la croix du Christ, il y a la mort et il y a la vie. Il y a là la mort de la mort et la vie de la vie, il y a là la mort des péchés et la vie des vertus, il y a là la mort de la chair et la vie de l’Esprit.
Mais pourquoi Dieu a-t-il choisi ce genre de mort ? Assurément en raison d’une signification cachée et en raison de l’exemple. Et ensuite parce que notre maladie était telle qu’il convenait d’y apporter un remède de ce genre. De fait, il convenait que, tombés par le bois, nous nous relevions par le bois. Il convenait que soit vaincu par le bois celui qui avait vaincu par le bois. A nous qui avions pris, du bois, un fruit de mort, il convenait que fût donné, du bois, un fruit de vie. Et parce que, de la terre de stabilité et de bonheur, nous étions tombés dans la grande et vaste mer, il convenait que nous soit préparé le bois pour nous faire passer. Car personne ne traverse la mer sans bois, ni le monde sans la croix.