Jérémie 1,4-10 . 17-19
A propos de Jean le Baptiste
Aelred de Riévaulx
Sermons pour l’année, Pain de Cîteaux 11, p. 207s

Celui qui présente à autrui la Parole de Dieu ne doit pas viser à faire étalage de sa science, mais chercher le moyen d’édifier ses auditeurs. Aussi doit-il adapter son discours aux dispositions de ceux qui l’écoutent, être patient envers ceux qui sont intellectuellement plus faibles avec une prévenance toute maternelle, et s’abaisser pour ainsi dire jusqu’aux balbutiements d’un langage d’enfant. Dans mon cas, c’est plutôt l’insignifiance de mon talent qui requiert de mes auditeurs qu’ils inclinent l’oreille vers un discours assez médiocre. Voilà pourquoi, j’avoue que je ne suis pas peu honteux. Mais je retrouve une certaine hardiesse quand je regarde le bienheureux Zacharie, père du saint dont nous célébrons aujourd’hui la fête. Lorsqu’il voulut prononcer le nom de Jean, il devint parfaitement éloquent par le simple fait d’exprimer ce nom, alors qu’il avait été muet jusque-là. Peut-être que nous aussi nous ne serons pas tout à fait muets si nous commençons à parler de Jean.
Mais que dire de lui ? Que dirons-nous à sa louange ? Avant même de naître, il a été loué par une voix qui fait autorité, celle d’un ange ; dans le sein où il est arrivé contaminé par le péché, il est devenu, par une grâce ineffable, la très digne demeure de l’Esprit Saint. Il ne faut omettre les autres détails : c’est un prêtre qui fut choisi pour être son père, c’est au Temple que sa naissance fut annoncée, son nom lui fut imposé, c’est un ange qui l’indiqua. Et l’heure n’est pas sans importance : c’était en effet à l’heure de l’encens. Plût au ciel, mes frères, que nous fassions partie de ces prêtres à qui l’apôtre Pierre dit : Vous êtes un peuple élu, une royauté de prêtres. Plût au ciel que notre cœur soit un temple de Dieu, comme dit l’apôtre : Le Temple de Dieu est sacré, et ce Temple, c’est vous. Alors, à l’heure de l’encens, à l’heure d’une salutaire componction, quand notre prière s’élève comme un encens devant la face de Dieu, peut-être qu’un ange nous apparaîtra, un messager de la grâce divine. Car Jean signifie « grâce de Dieu ». Et, c’est bien à propos que, à l’instigation de l’ange, ce nom lui fut donné puisque, encore couché dans le sein maternel, il reconnut la grâce ineffable, celle du Verbe fait chair. Par la suite encore, il désigna du doigt ce même Verbe fait chair et, admirable prédicateur de la grâce de Dieu, il a ouvert par sa parole le chemin vers le Royaume céleste, même aux publicains et aux prostitués, faisant comme violence à la pureté du ciel par la conversion de ceux-ci.