Sur Jean 2, 1-12
Aux noces de Cana
Saint Augustin
Traité sur l’évangile de saint Jean, Traité 8, OC 9, p. 322s

Le Seigneur, invité à des noces, se rend à cette invitation. Qu’y a-t-il de surprenant qu’il vienne dans cette maison assister à des noces, lui qui est venu dans le monde pour célébrer des noces toutes divines ? Si tel n’est pas l’objet de sa venue sur la terre, il n’a point d’épouse ici-bas. Que signifient alors ces paroles de l’Apôtre : Je vous ai fiancé à cet unique époux, Jésus, pour vous présenter à lui comme à une vierge pure ? Et quelle est la crainte de l’Apôtre ? C’est que la virginité de l’épouse de Jésus-Christ ne soit corrompue par les artifices du démon. Je crains, dit-il, que comme Eve fut séduite par les artifices du serpent, vos esprits de même ne se corrompent et ne dégénèrent de la simplicité et de la chasteté qui est selon Jésus-Christ. Le Sauveur a donc ici-bas une épouse qu’il a rachetée de son sang, et à laquelle il a donné l’Esprit Saint comme gage de son amour. Il l’a délivrée de l’esclavage du démon, il est mort pour ses péchés et il est ressuscité pour sa justification. Qui offrira jamais à son épouse des dons aussi précieux ? Que les hommes offrent tous les ornements que la terre met à leur disposition, de l’or, de l’argent, des pierres précieuses, des chevaux, des esclaves, des domaines, des terres, s’en trouvera-t-il un seul pour offrir son sang ? S’il donnait son sang à son épouse, comment pourrait-il l‘épouser ? Le Seigneur au contraire meurt en assurance, il a donné son sang pour celle qu’il devait épouser après sa résurrection, et qu’il s’était unie déjà dans le sein de la très sainte Vierge. Car le Verbe est l’époux, la chair humaine est l’épouse, et ces deux natures ne forment qu’un seul Fils de Dieu, un seul et même fils de l’homme. Le sein de la Vierge Marie a été comme un lit nuptial où il est devenu le chef de l’Eglise, et il en est sorti comme un époux qui sort du lit nuptial, selon la prédiction du Roi-Prophète : Semblable à un époux qui sort de son lit nuptial, il s’est élancé comme un géant pour parcourir sa carrière. Il est sorti comme un époux de son lit nuptial et s’est rendu à l’invitation qui lui a été faite d’assister aux noces. Dans un dessein évidemment plein de mystères, il paraît méconnaître la mère du sein de laquelle il est sorti lorsqu’il lui dit : Femme, qu’y a-t-il de commun entre toi et moi ? Mon heure n’est pas encore venue. Notre Seigneur est à la fois homme et Dieu ; comme Dieu, il n’a pas de mère, comme homme il en a une. Le miracle qu’il va faire est une œuvre de sa divinité et non de son humanité ; il doit donc le faire comme Dieu qui a toujours existé et non comme homme faible né dans le temps.