Sur Hébreux 11, 1-19

La foi exemplaire d’Abraham

Saint Grégoire de Nysse

Contre Eunome, tome II, SC 551, première partie III, 84-89, p. 159s

 

Abraham sortit, sur ordre de Dieu, de son propre pays, de sa parenté, selon une démarche d’exode convenant à un homme prophète, pressé d’arriver à la connaissance de Dieu. Il ne me semble pas qu’une transmigration d’un lieu à un autre puisse procurer la compréhension des réalités intelligibles. Mais Abraham étant sorti de lui-même de son propre pays, je veux dire de sa manière de penser terrestre, et ayant élevé sa pensée, autant qu’il était possible au-dessus des limites communes de la nature, cheminant dans la foi et non dans la claire vision, Abraham, dis-je, s’est élevé par la sublimité de la connaissance à un tel degré qu’il fut considéré comme le sommet de la perfection humaine pour avoir connu Dieu autant qu’il était possible d’y parvenir. C’est pourquoi le Seigneur de toute la création, devenu en quelque sorte une découverte du patriarche, est appelé au sens propre Dieu d’Abraham. L’Ecriture poursuit à son sujet : Il sortit sans savoir où il irait, sans être capable d’apprendre le nom de celui qu’il aimait, tout en n’éprouvant ni sentiment de peine, ni sentiment de honte à cause de cette ignorance. Le principe sûr qui le guidait dans sa recherche était de ne pas se laisser guider par aucune des choses immédiatement perceptibles pour arriver à la compréhension de ce qui relève de la réflexion sur Dieu. Après s’être élevé au-dessus de ce qui est connu par les sens, Abraham ressentit, sous l’effet de la beauté des choses contemplées et de l’harmonie des merveilles célestes, le désir ardent de voir la beauté, et de même pour toutes les autres choses qu’il comprenait à mesure qu’il progressait dans sa réflexion, il en fit des moyens d’approche et des marchepieds dans sa marche vers Dieu, s’appuyant toujours sur ce qu’il avait trouvé et toujours tendu vers l’avant. Après qu’il eut parcouru toute l’étendue des conjectures de la nature divine, ayant purifié sa pensée et ayant adopté une foi pure, il fixa comme signe infaillible et manifeste de sa connaissance de Dieu le fait de croire que Dieu est plus grand et plus sublime que tout signe propre à le faire connaître.