Sur Jean 14, 15-21

« Celui qui m’aime sera aimé de mon Père et je l’aimerai »

Père Cor Traets

La présence de Jésus, du Père et de l’Esprit dans l’Eglise, AS 27, p. 43s

 

 Celui qui m’aime sera aimé de mon Père et je l’aimerai. Cela ne signifie nullement que notre amour est premier. Il s’agit plutôt d’un dialogue d’amour dont le Père et Jésus ont l’initiative. Aimer Jésus et par conséquent aimer ses frères consiste en somme à croire dans l’amour divin, à recevoir cet amour, à entrer dans son dynamisme et à y demeurer : Comme le Père m’a aimé, moi aussi je vous ai aimés. Demeurez dans mon amour. Si vous gardez mes commandements, vous demeurerez en mon amour. Accueillir l’amour du Père que Jésus manifeste, aimer ses frères de l’amour dont Jésus les aime, c’est, pour les disciples, aimer Jésus et le Père. Voilà pourquoi dans cet amour se réalise la présence de Jésus et du Père : Nous viendrons à lui et nous ferons chez lui notre demeure. Il s’agit d’une véritable présence réciproque : les disciples demeurent dans l’amour divin, le Père et Jésus  font leur demeure en eux.

On pourrait objecter que le commandement de l’amour fraternel est donné pour le temps de l’absence de Jésus. Cette absence se situe entre son départ, par la mort et par la fin des apparitions, et sa seconde venue lors de la Parousie. Jean suit ici la doctrine commune, telle qu’on la trouve dans les synoptiques et chez saint Paul : la charité fraternelle, qui murît les chrétiens pour la Parousie, est leur devoir essentiel dans l’entre-temps.

Il nous faut cependant tenir compte de la pensée spécifiquement johannique. L’histoire du salut atteint son point culminant et décisif dans la venue de Jésus en ce monde, surtout dans sa mort et sa glorification, manifestation de Dieu qui, en son Fils, sauve et juge les hommes. Durant la vie terrestre de Jésus déjà, les Juifs se trouvaient devant l’alternative : être sauvés par lui ou se condamner eux-mêmes ; Maintenant que le Seigneur est glorifié, tous les hommes se trouvent soumis au même choix. Certains auteurs, pour caractériser cette optique johannique, parlent d’eschatologie réalisée, anticipée, sans exclure pour autant que, selon la doctrine même du quatrième évangéliste, nous sommes en route vers la consommation finale où notre option actuelle se verra ratifiée.

Dans cette perspective, nous comprenons la parole de Jésus, Seigneur eschatologique, qui promet, pour notre temps, sa présence salvatrice et celle du Père : Nous viendrons à lui, et nous ferons chez lui notre demeure. Cette dernière expression exprime une continuité. Durant toute la période de l’Eglise, le Père et le Fils sont présents, non seulement aux disciples auxquels s’adresse directement le discours, mais à tous les croyants.