Sur Josué 7, 4-26

La défaite de la désobéissance

Stéphane Ancel

Josué, premier conquérant de la Terre Sainte, p. 113s

 

La ville de Jéricho prise, l’argent, l’or et les objets de bronze et de fer furent livrés au trésor de la maison de Dieu. Le second objectif de la conquête est maintenant la ville de Aï afin de s’assurer de la maîtrise de la région. Mais les conséquences de la prise de Jéricho n’étaient pas terminées car les Israélites se rendirent coupables d’une violation de l’anathème. Akân, de la tribu de Juda, prit ce qui tombait sous l’anathème, et la colère de Dieu s’enflamma contre les Israélites. Aussi l’assaut de Aï, bien que préparé avec soin, est un échec, et le peuple perdit cœur et son courage fondit.

Nous assistons alors à l’une des cènes les plus personnelles et les plus touchantes de ce que nous dévoilent les auteurs bibliques sur Josué ; peut-être là plus qu’ailleurs, il prend la mesure de Moïse. Respectant les règles les plus strictes du deuil ou de la contrition, il déchire ses vêtements, se répand de la poussière sur la tête. En même temps, il se prosterne face contre terre devant l’Arche de Dieu jusqu’au soir. Sa plainte, celle de ses épaules, qui, parce qu’il est humain, plient sous le poids de la responsabilité, rappelle celle de Moïse après le terrible épisode du Veau d’or alors que Dieu venait d’annoncer l’extermination du peuple pour faire renaître une grande nation.

La rhétorique est bien huilée puisqu’on retrouve ce genre de supplique chez les prophètes, eux qui furent pris entre plusieurs feux, sans y être préparés, ni même l’ayant désiré. Josué marche ici dans les pas de Moïse ; deux événements se font constamment écho : la sortie d’Egypte et le passage du Jourdain. Au-delà de de la construction d’un peuple, nous sommes encore dans la définition de Dieu, c’est-à-dire les contours de son pouvoir sur la scène historique. Ce qui se dessine est clair : Dieu est désormais lié par son alliance. Si Dieu n’accorde pas à son peuple la victoire lors de la conquête, c’est son alliance qu’il n’honore plus. Perdre devant Aï au terme de la seconde bataille est inconcevable : si le nom d’Israël est effacé, c’est le nom même de Dieu, son existence aux yeux du monde, qui sera effacé. La ville fut investie, Josué respectant le commandement de Dieu : Tends vers Aï le sabre que tu as en main, car c’est en ta main que je vais livrer la ville. Et Josué ne ramena pas la main étendue avec le sabre jusqu’à ce qu’il eût voué à l’anathème tous les habitants, établissant une étroite corrélation entre ce geste de la main et l’accomplissement du commandement divin, geste qui est la garantie du succès.