Sur Isaïe 22, 1-14

L’oracle sur la vallée de Hinnom

 

Père Jean Steinmann

Le prophète Isaïe, sa vie, son œuvre et son temps, p. 233s

 

La foule est montée sur les terrasses de toits pour apercevoir le cortège triomphal. Les généraux de l’armée, la garde royale défilent. Ils entrent dans la ville par le sud, par la Gé-Hinnom ; il semble que ce soit dans cette vallée qu’Isaïe prononce son poème. Il assiste prophétiquement en esprit à la défaite, qui se change en une honteuse déroute. Les troupes d’Ezéchias ont renoncé à combattre. Les égorgés ne tombent pas sous les coups de l’épée, mais sont empalés sur l’ordre de Sennachrib. Les morts de sont pas atteints en combattant, mais sont tués honteusement dans leur fuite par les soldats assyriens.

 

Cette prévision de la débâcle et de la défection de l’armée provoque dans l’âme d’Isaïe une douleur pathétique. Une pareille compassion est rare de sa part. Habituellement le prophète a beau prédire les pires désastres, il semble y rester insensible. Cette fois, par contraste avec la joie générale, il se peint lui-même en train de se détourner de la foule bruyante pour éclater en sanglots.

 

Ensuite, à partir du verset 5, le prophète énumère les causes de la défaite. Si la coalition anti-assyrienne était puissante, les armées de l’Assyrie l’étaient plus encore. Isaïe énumère quelques-uns des peuples qui fournissaient à Sennachérib des mercenaires, et l’on peut rapprocher ce passage de son poème de l’oracle de la chute de Babylone, à propos duquel on pouvait s’étonner de la présence des Elamites sous les ordres des Assyriens. Qoâ et Shoâ, dont on croit retrouver les noms, sont deux peuples établis sur les bords d’un affluent du Tigre. La montagne contre laquelle se dresse Shoä est celle de Sion. Qîr est une tribu d’Araméens. Les vers de la fin du poème représentent la vallée de Hinnom remplie de cavaliers et de chars ennemis. C’était dire que tout le pays céderait à la pression de l’envahisseur.