Sur Matthieu 21, 33-43

La vigne est l’image de l’âme

 

Saint Basile de Césarée

Homélies sur l’Hexaéméron, SC 26, p. 305s

 

Que d’effets concourent avec empressement à l’œuvre de la nature ! La racine de la vigne, les ceps qui poussent tout autour et s’étendent largement sur le sol, le bourgeon, les vrilles, le raisin vert, les grappes…

Il te suffit de voir la vigne, si tu la regardes avec intelligence pour te souvenir de ta nature. Car tu te rappelles évidemment la comparaison du Seigneur qui se dit la vigne, et son Père le vigneron. Chacun de nous qui avons été greffés par la foi sur l’Eglise, il nous appelle des sarments, et il nous invite à porter beaucoup de fruits, de peur que notre stérilité ne nous fasse condamner et livrer au feu. Il ne cesse en toutes occasions de développer cette analogie des âmes humaines avec la vigne : Mon Bien-aimé avait une vigne, dit-il, sur un coteau, dans un lieu fertile, J’y ai planté une vigne, je l’ai entourée d’une haie. Ce sont évidemment les âmes humaines qu’il appelle sa vigne, elles qu’il a entourées comme d’une haie, de la sécurité que donnent ses préceptes, et de la garde de ses anges : Car l’ange du Seigneur campera autour de ceux qui le craignent. Et puis, c’est sur cette sorte de palissade qu’il a plantée autour de nous, en établissant d’abord des apôtres, en second lieu des prophètes, en troisième des docteurs. Et, par les exemples des bienheureux hommes d’autrefois, il a élevé nos pensées là-haut, sans permettre qu’elles gisent à terre, ni qu’elles méritent d’être foulées aux pieds. Mais il veut que les embrassements de la charité, comme les vrilles de la vigne, nous attachent au prochain, et nous fassent reposer sur lui, afin que, dans nos continuels élans  vers le ciel, nous puissions, telles des vignes grimpantes, nous élever jusqu’aux cimes les plus hautes. Il nous demande encore de nous laisser sarcler. Or, une âme est sarclée quand elle écarte de soi les soucis du monde, qui sont un fardeau pour nos cœurs. Celui, par conséquent, qui écarte de soi l’amour charnel et l’attachement aux richesses, ou qui tient le désir passionné de cette misérable gloriole pour odieuse et méprisable, est comme sarclé ; et il respire, délivré du vain fardeau des pensées terrestres. Mais il nous faut, dans l’esprit de la parabole, ni pousser en bois, c’est-à-dire vivre avec ostentation, ni rechercher la louange de ceux du dehors, mais fructifier en réservant nos œuvres pour les montrer au vigneron véritable.