Sur Ezéchiel 5, 17-17

La colère de Dieu

Edmond Jacob

Théologie de l’Ancien Testament, p. 91s

 

La colère est, parmi les sentiments de Dieu, un des plus fréquemment mentionnés et l’expression lent à la colère est loin de signifier qu’elle serait étrangère à son être. Les nombreux termes qui servent à la désigner sont tous empruntés au langage concret des expressions physiologiques de la colère. Il est intéressant de remarquer que ces termes se rencontrent bien plus souvent à propos de Dieu que des hommes ; aussi convient-il de garder à ces termes leur sens propre. L’Israélite croyait réellement à la colère de Dieu et ne l’a pas projetée en Dieu à partir des épreuves et des châtiments qu’il avait lui-même subis.

La colère est avant tout une action : Dieu la verse, la fait monter, l’envoie, l’accomplit. La colère fait à tel point partie de la figure du Dieu de l’Ancien Testament que les anciens Israélites n’y ont pas vu un problème, mais qu’ils acceptaient cette réalité comme faisant partie normalement de l’irrationnel et du mystère divins. Bien des textes montrent à l’œuvre cette puissance écrasante et terrible, et même s’ils ne mentionnent pas toujours à ce propos la colère, ils en expriment le contenu essentiel, à savoir la menace qu’un dieu mystérieux et puissant fait peser sur toute existence. Cet aspect apparaît, par exemple, dans la lutte de Jacob avec l’ange, dans l’attaque nocturne de Moïse, ou dans les nombreux passages qui parlent de la face de Dieu qui ne veut pas être vue, et de la sainteté dont le contact trop direct provoque la mort. Expression de sa puissance, la colère de Dieu est mise par Dieu au service de ses intentions, car, tout ce que Dieu fait a, un but qui est l’instauration de sa royauté et dont le grand jugement sera l’acte décisif. Le Jour de Dieu sera, en effet, un jour de colère. L’homme, en tant qu’être humain, est sous le coup de la colère de Dieu ; celle-ci pourrait même ne pas avoir été étrangère à sa création et Dieu aurait fait l’homme mortel afin de le dominer.

La sainteté de Dieu édifie davantage qu’elle n’écrase : Je suis le saint, dit Dieu, je ne viendrai pas avec colère, car pour un Dieu vivant et qui donne la vie, la colère ne saurait être le dernier mot. Aussi l’enseignement de l’Ancien Testament sur la colère trouve-t-il son expression logique dans l’affirmation du psalmiste : La colère est d’un instant, sa faveur dure toute la vie.