Les Actes des Apôtres 14,8 – 15,4

Le discours de Paul à Lystres

Père Divo Barsotti

Les Actes des Apôtres, p. 667s

        Pour Paul, l’adoration dont il est l’objet devient une occasion d’annoncer l’Evangile. Nous avons ici le schéma des discours de Paul aux païens. Quand les apôtres parlaient à des Juifs, ils leur disaient reconnaître une continuité entre l’Ancien et le Nouveau Testament : le Dieu qui s’est manifesté dans l’histoire du peuple juif se révèle dans le Christ Seigneur. Par contre, dans les discours aux Gentils la continuité s’établit entre la création et la révélation chrétienne, indépendamment de l’histoire. Le discours de Lystres, aussi bien que celui d’Athènes, sont à l’origine d’une nouvelle théologie, différente de celle qui jusqu’alors se fondait dans l’harmonie des deux Testaments. Il y a continuité entre toute religion et le christianisme : toute vie religieuse, quelle qu’elle soit, est en relation avec le christianisme, parce que le Christ n’est pas seulement le Serviteur de Yahvé, n’est pas seulement le Fils de David, mais qu’il est le Logos, il est la Sagesse créatrice.

       Deux expressions sont importantes dans ce bref discours. Il dit d’abord que le Dieu transcendant, qui a créé toutes choses, a permis que toutes les nations suivent leurs voies ; il affirme ensuite que Dieu n’a jamais cessé de se rendre témoignage à lui-même. Il semble donc que la légitimité de tout culte religieux soit reconnue par l’Apôtre, excepté le judaïsme ; mais une condition très claire est posée à cette légitimité : les nations doivent reconnaître que Dieu s’est rendu témoignage à lui-même. Les nations doivent se détourner des idoles et se convertir au Dieu Vivant qui a créé toutes choses.

            Ce discours de Lystres, un des plus courts rapporté par les Actes, est important. Le Dieu de l’Histoire du Salut ne cesse pas d’être le Dieu de la Création. La Providence spéciale qui se manifeste par les interventions de Dieu dans l’histoire ne doit pas nous faire oublier la providence plus commune, plus universelle et continue, dont Dieu assiste tout ce qu’il a créé. Par la conscience que l’homme a de cette Providence, la vie de l’univers prend un caractère et un contenu religieux. Dans sa dépendance des saisons, dans son lien avec la terre d’où il tire sa nourriture, l’homme vit déjà une dépendance et un lien avec Dieu. Dans la religion cosmique, le rapport de l’homme avec la terre-mère implique la Providence que l’homme attend du ciel. Mais à la différence de la religion d’Israël, dans laquelle la liberté souveraine de Dieu se révèle dans les événements imprévisibles de l’histoire, dans la religion cosmique Dieu se révèle dans un pacte qui le lie pour toujours avec la stabilité des lois qui gouvernent le monde : ici le rapport de l’homme avec Dieu est moins profond, mais il est toujours sûr, et il est universel, malgré le péché de l’homme.