Les Actes des Apôtres 26, 1-32

Les baisers divins

Saint Bernard

Commentaire sur le triple état de l’amour, OC 5, p. 427s

           Il est un baiser qu’en plusieurs manières Dieu, parlant à nos pères, avait promis à son Eglise et dans lequel il s’est entretenu avec nous en la personne de son Fils. Car cette expression, il nous a parlé par son Fils, c’est le baiser lui-même. L’union du Verbe et de celui qui l’écoute, de la divinité et de l’humanité, constitue en effet comme un baiser de charité. C’est ce qu’Isaïe voyait à l’avance dans l’Esprit de Dieu : Il sortira une tige de la racine de Jessé, et une fleur s’élèvera de la racine ; sur elle, se reposera l’esprit du Seigneur, esprit de sagesse et d’intelligence, esprit de conseil et de force, esprit de science et de piété, et l’esprit de crainte du Seigneur l’inondera. Ce sont là les sept dons ou les sept grâces du Saint-Esprit qui brillèrent spécialement dans le Seigneur Jésus, de même que sur lui se reposa particulièrement ce divin Esprit. Dans la crainte, se trouve désigné l’humilité, dans la piété la miséricorde, dans la science la connaissance de ce qui se passe sur la terre, dans la force la patience, dans le conseil l’utilité, dans l’intelligence l’unité de la divinité, dans la sagesse le bon emploi de la puissance. Par les cinq premiers, le Christ se proportionne à l’homme dans la nature humaine qu’il avait prise ; par les deux derniers, la personne du Christ fut toujours unie à la divinité. Car, semblable à un bon médecin, ce divin Sauveur s’abaissa humblement vers son malade, il toucha ses blessures avec miséricorde, il les reconnut, car il connaissait la chair où elles avaient été faites, il supporta avec patience ses folies, appliqua à chaque maladie le remède qui y convenait, restant inséparablement une même chose avec son Père. En l’esprit humain, il connut le Père d’une manière singulière, parce que personne ne connut le Père si ce n’est le Fils. Par cette sagesse du Père qui n’est pas autre chose que lui-même, atteignant avec force d’une extrémité à l’autre, il disposa tout avec règle et douceur. Cette union de la nature divine et humaine est comme ce baiser de l’époux et de l’épouse que l’Eglise désirait en ces termes : Qu’il me baise d’un baiser de sa bouche. Il y a trois autres baisers par lesquels l’épouse est unie à l’époux, le baiser de la nature, le baiser de la doctrine et le baiser de la grâce.