Exode 24, 1-11 ou 1 Corinthiens 18-34

L’Institution du repas eucharistique

Père Edmond Barbotin

Humanité de Dieu, p. 317s

       Le lieu de l’événement est significatif. Jésus inaugure ce banquet nouveau à Jérusalem, centre national et religieux vers lequel convergent, depuis des siècles, la foi et l’espérance du peuple de la promesse, lieu où le Messie doit être mis à mort le lendemain. Puis, de ce point du monde où Israël se rassemble pour la Pâque mosaïque, la Pâque nouvelle va s’étendre à l’univers tout entier.

       Le temps de l’institution est donc, lui aussi, essentiel. Malgré la hâte de son désir, Jésus a voulu attendre la célébration de la Pâque juive : J’ai désiré avec ardeur manger cette Pâque avant de souffrir.

       La fête fournit au Christ l’occasion d’accomplir tout le passé d’Israël, de même que sa parole venait accomplir la Loi. La Pâque juive est achevée, c’est-à-dire parfaite et dépassée. Les figures s’effacent devant la réalité. Sous des signes, Dieu donne à son peuple nouveau tous les biens du Royaume. Le repas rituel institué par Jésus est, de la part de Dieu, accomplissement des promesses ; de la part de l’homme, action de grâces pour cet accomplissement même, eucharistie. L’acte unique et simple posé par Jésus-Christ est à la foi le Oui de Dieu à ses annonces et l’Amen de l’homme au salut offert.

       Le rite pascal, cadre de l’institution nouvelle, fait du repas du Seigneur un repas du soir, la Cène par excellence. Plus qu’aucun autre moment du jour, tous travaux ayant cessé, cette heure est celle de l’intimité, du recueillement et de l’abandon propice aux confidences. En outre, une circonstance décisive ajoute à cette signification : il s’agit, pour Jésus, d’un repas d’adieu. C’est en pleine conscience de sa mort prochaine que le Maître réunit les siens autour d’une même table, célèbre la Pâque ancienne, institue la Pâque nouvelle, donne ses dernières consignes. La force de présence propre à toute communauté de table reçoit du sacrifice et de la séparation imminents une densité exceptionnelle. Sans doute, à lire les récits évangéliques, sent-on les disciples encore étrangers au sens le plus profond des gestes et des paroles du Maître. Mais, lents à comprendre, les Douze perçoivent dans l’attitude de Jésus la gravité de l’heure et la prégnance de l’instant.