Qohélet 1, 1-18

Trouver sa règle de vie dans les deux Testaments

Saint Augustin

Des mœurs de l’Eglise catholique, OC 3, p. 520s

              Pour ce qui est de la gloire du monde, elle est réprouvée et méprisée dans le Nouveau Testament par ces paroles de saint Paul : Si je voulais plaire aux hommes, je ne serais pas le serviteur du Christ. Puis il y a encore la science des choses que l’âme tire des objets corporels et qu’elle conçoit par le moyen des images sensibles, science qui peut s’élever jusqu’à une curiosité coupable ; ce sera la grande fonction de la tempérance d’en arrêter les excès : Prenez garde que quelqu’un ne vous trompe par la philosophie. Et parce que le nom de la philosophie, considéré en lui-même, exprime une grande chose qu’on doit désirer de tout son cœur, puisque la philosophie est l’étude et l’amour de la Sagesse, l’apôtre, pour ne pas paraître détourner les hommes de cet amour, ajoute, avec la plus grande prudence, à sa première phrase : Prenez garde que quelqu’un ne vous trompe par la philosophie, ces autres paroles : et les éléments de ce monde.

       L’autorité du Nouveau Testament, qui nous défend d’attacher notre affection à toutes choses de ce monde, est donc incontestable surtout dans ce passage de la lettre aux Romains : Ne vous rendez point conformes au monde. Car celui qui aime tend toujours à se rendre conforme à l’objet aimé. Si maintenant, à cette autorité, je cherche à comparer l’Ancien Testament, les témoignages se présentent en foule. Mais seul le livre de Salomon que l’on appelle Ecclésiaste suffit pour jeter le plus profond mépris sur les biens de la terre : Vanité des vanités, tout n’est que vanité. Que reste-t-il à l’homme de tous les travaux qu’il accomplit sous le soleil ? Si l’on veut considérer, peser, examiner chacune de ses paroles, on y trouvera des instructions nécessaires à ceux qui désirent quitter le monde et se réfugier en Dieu. L’Ecclésiaste, tirant les conséquences de ce grand principe, montre que les hommes vains sont ceux qui se laissent tromper par les objets terrestres, objets qui sont vanité et néant, non que Dieu ne les ait pas créés, mais parce que les hommes, par le péché, s’abaissent volontairement au-dessous de ce qui leur est inférieur selon l’ordre de la loi divine. L’homme tempérant trouve donc dans les deux Testaments la règle de vie qu’il doit suivre au milieu de la multitude des choses mortelles et passagères : il doit n’en aimer aucune, n’en croire aucune désirable par elle-même, mais en user seulement pour les nécessités et les devoirs de la vie.