Luc 21, 25-28 + 34-36

Le scénario de la fin

Père Jacques Dupont

Les trois apocalypses synoptiques, p. 131s

       Substituée à une description du rassemblement des élus, une scène qui relevait déjà du monde à venir, l’exhortation du verset 28 : Ces choses commençant d’arriver, redressez-vous et relevez la tête, parce que votre libération est proche, manifeste une vive sollicitude à l’égard des chrétiens qui, eux aussi, vont se trouver mêler aux cataclysmes terrifiants annoncés par les versets 25-26 : Il y aura des signes dans le soleil, la lune et les étoiles. Sur terre, les nations seront affolées par le fracas de la mer et de la tempête. Les hommes mourront de peur dans la crainte des malheurs arrivant sur le monde.

Un premier contraste frappe immédiatement : celui qui oppose le ton consolant et encourageant de l’exhortation aux images d’épouvantes. Tout cela doit être compris par les chrétiens comme le signal de leur prochaine délivrance, comme les plaies d’Egypte marquaient pour les Israélites la promesse de leur libération prochaine. Tandis que la peur fera expirer les uns, la joie fera se redresser les autres. Luc, plein de sollicitude à l’égard des croyants, entend encourager, non pas effrayer.

Un autre contraste peut apparaître si l’on compare  la finale du verset 28, votre libération est proche, avec celle de la section sur les persécutions : Par votre constance, vous acquerrez vos âmes. Faire preuve de constance, cela signifie étymologiquement tenir sous : rester ferme sous l’avalanche des épreuves qui vous tombent sur la tête. L’attitude est celle d’un homme qui s’arc-boute, qui rentre la tête entre ses épaules. Quand le chrétien verra l’univers commencer à se défaire, il pourra comprendre qu’est aussi arrivé le moment de se détendre, de se redresser, de lever la tête : le temps d’endurer est passé.

Il paraît clair que, dans la perspective de Luc, l’exhortation du verset 28 vise directement les croyants pour le moment où commenceront à se réaliser les signes catastrophiques de la fin. On peut cependant se demander si cette exhortation n’a pas une portée plus large, dans la mesure où l’attitude qu’elle recommande est celle de l’espérance. , celle de la confiance en la sollicitude de Dieu, d’un Dieu toujours proche. En ce sens l’attitude de celui qui se redresse et relève la tête n’est pas opposée à l’attitude de celui qui se courbe et s’arc-boute pour tenir bon. Il s’agit simplement de deux aspects complémentaires d’une même fidélité : c’est par l’espérance que la constance est possible. Toutes les épreuves qui exigent du chrétien la pratique de la constance peuvent être ainsi comprises comme une invitation à se redresser et à relever la tête.