1 Corinthiens 6, 12-20

« Tout m’est permis, mais tout ne me convient pas »

Père Claude Wiener

Le corps et le corps du Christ, Notes sur 1 Corinthiens 6,16-20, p. 90s

       Le texte lu s’articule en deux parties. La deuxième partie, les versets 16 à 20, a pour ossature trois phrases commençant par Ne savez-vous pas. La première et la troisième de ces phrases peuvent être qualifiées de théologiques.

       La première concerne le rapport corps/Christ : Vos corps sont membres du Christ. C’est de nos corps qu’il s’agit, c’est de ce même corps qui est en rapport avec la prostituée à la ligne suivant. Mon corps sexué est membre du Christ.

       Le troisième Ne savez-vous pas évoque successivement deux données : d’une part la relation avec l’Esprit reçu de Dieu qui fait du corps un temple, et d’autre part l’achat moyennant un prix. L’emploi du verbe au passif évoque ici l’action du Seigneur. Il résulte donc un transfert de propriété : Vous n’êtes plus à vous-mêmes, ce qui rejoint l’affirmation précédente : Vous êtes membres d’un autre, le Christ.

       Entre ces deux affirmations théologiques, apparaît le véritable sujet du débat, que tout le reste veut éclairer. Comme ailleurs dans cette épître, Paul vise ici les questions qui se posent à Corinthe. En l’occurrence, certains Corinthiens, arguant évidemment de ce que, au nom de l’Evangile, désormais tout est permis, ne voient aucun mal à avoir des relations avec des prostituées. Ces deux affirmations théologiques encadrent le second Ne savez-vous pas. On a ici encore une série d’antithèses : membre du Christ/membre de prostituée ; devenir un seul corps (une seule chair) avec la prostituée/devenir un seul esprit avec le Seigneur ; pécher hors de son corps/pécher envers son propre corps.

       Au centre, nous trouvons la citation de Genèse 2,24 : Ils deviendront tous deux une seule chair. Par une transposition assez hardie, cette phrase relative à l’union conjugale durable est appliquée à l’union occasionnelle de la prostituée avec son partenaire de rencontre. Créer un tel lien devient alors une trahison par rapport au Christ, puisque le corps est pour lui et qu’il est membre du Christ. C’est au Christ qu’il faut s’attacher. On s’attendrait à ce qu’avec lui aussi on devienne un seul corps, mais Paul dit un seul esprit. Le glissement peut être dû au fait qu’on est passé de un seul corps à une seule chair, à cause de la citation du livre de la Genèse, et que, du coup, Paul a retrouvé l’opposition familière à sa pensée chair/esprit, et ce, d’autant plus que la relation dont il s’agit est dégradante ce qui induit le sens négatif, typiquement paulinien, de chair.

       Finalement, et c’est la dernière partie du dernier verset de ce chapitre, il s’agit de glorifier Dieu dans notre corps, c’est-à-dire de vivre nos relations, y compris sexuelles, dans le sens voulu par Dieu, dans le sens qui fera rayonner sa puissance et son amour : c’est cela la gloire biblique.