Actes 11, 1-18

Pierre à Jérusalem

Dom Jacques Dupont

Nouvelles études sur les Actes des Apôtres, p. 101s

       A son retour de Césarée, Pierre se voit pris à partie par les judéo-chrétiens de Jérusalem : en séjournant chez des incirconcis, il a manqué à ses devoirs religieux les plus élémentaires. On le somme de s’expliquer. Ne nous attendons pas à ce que Pierre se retranche derrière l’autorité qu’il doit à son mandat et rappelle aux contestataires les devoirs de l’obéissance. Il s’agit pour lui d’obtenir l’assentiment de l’Eglise de Jérusalem à ce que Dieu, Dieu seul, vient d’accomplir par son ministère.

       Son discours consiste presque entièrement en un exposé des faits que le lecteur des Actes connaît déjà ; le résumé de Luc met en valeur les interventions surnaturelles qui ont déterminé la conduite de Pierre. Il rapporte d’abord la vision de Joppé, il mentionne également l’intervention de l’Esprit Saint l’invitant à accompagner les envoyés de Corneille. Il fait ensuite état de l’apparition dont le centurion avait été favorisé et de l’effusion de l’Esprit qui se produisit au moment où il commençait à parler.

       Cette dernière intervention constitue le signe décisif. Pierre commence par le présenter comme un accomplissement de la parole prophétique prononcée par le Seigneur : Jean a baptisé dans l’eau, vous, vous serez baptisé  dans l’Esprit Saint. Cette prédiction se rapportait clairement à l‘évènement de la Pentecôte.

       Tel est précisément le présupposé dont le verset 17 tire la conclusion : Si donc Dieu leur a accordé le même don qu’à moi, qui étais-je, moi, pour faire obstacle à Dieu ? L’effusion de l’Esprit sur les incirconcis de Césarée est assimilée à celle dont les apôtres ont été gratifiés à Jérusalem le jour de la Pentecôte. Cette assimilation ne résulte pas simplement des effets produits par la venue de l’Esprit ; l’essentiel se trouve dans le fait que l’Esprit lui-même est donné : comment refuser de considérer comme membres de l’Eglise des gens qui ont reçu l’Esprit tout comme les apôtres ? En pratique : commet subordonner l’admission de ces Gentils dans l’Eglise à leur acceptation de la circoncision ?

       Il revient aux Judéo-Chrétiens eux-mêmes de dégager le sens de ce qui vient d’arriver à Césarée : Ainsi donc, aux Gentils également Dieu a accordé le repentir qui conduit à la Vie ! Il y a moyen d’être sauvé tout en restant Gentil : il n’est pas nécessaire pour les Gentils de se faire Juifs par la circoncision.