Hébreux 7, 11-28

La vie divine

Père Albert Vanhoye

Le don du Christ, p. 150s

        Le Christ, lui, n’a jamais été souillé dans son cœur par le péché, c’est pourquoi il a pu vaincre la mort. Il a, certes, subi la mort, mais de telle façon qu’il l’a totalement transformée. De ce qui était la triste conséquence de la désobéissance égoïste, il a fait l’acte suprême d’obéissance filiale et d’amour fraternel ; et ainsi, de ce qui était la pire des impasses, il a fait le chemin du salut. L’auteur a déjà exposé ce mystère, il n’y revient pas dans le texte que nous venons de lire, mais il y contemple le Christ vainqueur que Dieu a proclamé grand-prêtre. Il demeure pour l’éternité : basée sur l’oracle du psaume 109, Tu es prêtre à jamais selon l’ordre de Melchisédech, cette affirmation n’exprime pas simplement, entre le sacerdoce du Christ et celui des anciens grands prêtres, un  contraste dans l’ordre de la durée, mais elle manifeste en même temps une différence fondamentale dans la relation avec Dieu. Les prêtres esclaves du prince de la mort ne pouvaient être admis en présence de Dieu. Le Christ vainqueur de la mort se trouve intimement uni à Dieu, car demeurer dans l’éternité, c’est participer à la vie de Dieu. Seul celui qui siège à la droite du Père peut ainsi demeurer à jamais. Par sa victoire sur la mort, le Christ s’est manifesté comme le Fils sans commencement de jours, ni de fin de vie, qui, dès avant la création, reflétait la gloire du Père et qui continuera à la refléter au-delà de la fin du monde.

        Le sacerdoce qu’il exerce désormais dans son humanité glorifiée ne peut donc connaître aucune des déficiences qui atteignaient les anciens grands prêtres, et qui, tôt ou tard, entraînaient leurs remplacements. Pour exprimer la qualité de ce nouveau sacerdoce, l’auteur se sert d’un adjectif, aparabatos, qui signifie littéralement : à côté de qui on peut marcher. Ce mot s’employait surtout dans une acception juridique : ordre ou défense qu’on ne peut transgresser, disposition inviolable. Mais on l’appliquait aussi à un enchaînement de causes inéluctables ou à des prédictions auxquelles on ne peut échapper. Il qualifie une réalité qui, en quelque sorte, remplit tout l’horizon, et qui n’appelle, ni n’admet aucune solution de rechange. Tel est bien le cas du sacerdoce du Christ. En lui, aucune lacune à combler, aucune défaillance à craindre. Aussi doit-on dire que le Christ prêtre n’aura jamais besoin de personne, ni pour le suppléer, ni pour le remplacer. Personne ne se trouve d’ailleurs en mesure de se hausser à son niveau. De là, le contraste avec ce qu’on peut appeler la précédente instabilité sacerdotale.